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1o Deux concessions d’un mètre chaque 2 m 00
2o Deux demi-passages de 0m 25 chaque 0 50
3o Un passage de 0 50

Total 3 m 00

Et pour la profondeur :

1o Sur l’allée principale, une marge de 0 m 25
2o Deux terrains de 2 mètres chaque ; ensemble 4 00
3o Un intervalle de 1 00
4o Plus un demi-intervalle de 0 75

Total 6 m 00


ce qui donne une superficie totale de 18m 00 pour quatre concessions ordinaires, dont les superficies effectives réunies sont de 8 mètres[1].

Or, d’après notre système d’aménagement des berges, nous avons, pour le même nombre de concessions de 2 mètres chaque, une largeur de 2m 92, et une profondeur de 6m 10, qui donnent une superficie de 17m 81, un peu moindre que dans la division en plaine, et il présente l’avantage de pouvoir planter une zone d’arbustes d’un mètre de large entre deux zones de tombeaux, avantage qui ne peut exister dans le système ordinaire, même en plaine ; mais si nous voulions réduire, suivant l’usage généralement adopté, la longueur intérieure du caveau à 1m 90 et l’épaisseur des murs des extrémités à 30 centimètres au lieu de 45 centimètres, il ne resterait pour profondeur totale de deux rangées de concessions, que 5m 20, et la largeur restant de 2m 92, nous n’aurions qu’une superficie de 15m 18 pour quatre concessions, au lieu de 18 mètres donnés par la division établie dans les cimetières.

Tous ces tombeaux étant construits solidairement dans un mur de soutènement continu, dans l’épaisseur duquel ils seraient évidés, présenteraient à la poussée des terres une culée de 3 mètres d’épaisseur sur moins de 3 mètres de hauteur. (Voy. Fig. 5, 6 et 7, Pl. 9.) La face des murs du fond, côté des terres, serait garnie, dans toute sa hauteur, d’un rang de moellons à sec pour livrer passage aux eaux pluviales filtrant au travers des terres, et ces eaux, reçues dans un caniveau, seraient rejetées sur l’allée inférieure par des tuyaux posés au travers des murs de refend séparant les tombeaux.

Les façades des tombeaux, se détachant en relief sur le nu du mur de terrasse, pourraient se varier à l’infini. Chacun ornerait sa façade comme il l’entendrait, soit en marbre, soit en pierre ; on y ménagerait de petits oratoires ou chapelles, ou bien on n’y laisserait qu’une simple entrée de caveau, surmontée d’un cénotaphe ou façade quelconque. (Voy. Fig. 7.)

Nous insistons sur la nécessité d’orner les cimetières de plantations, car la végétation est un accessoire obligé des sépultures. Les anciens ne négligeaient pas cet accompagnement quand leurs tombeaux étaient apparents : le fameux tombeau d’Auguste, entre autres, était un immense cône disposé par encaissements en amphithéâtre, dont chaque gradin était planté d’une zone de grands arbre ; il était, en outre, entouré d’un bois funèbre appelé bustum. D’après Hérodote, le tombeau d’Alyatès, roi de Lydie, était disposé de la même manière.

Quand les tombeaux étaient souterrains on y peignait des fleurs, tant la végétation paraissait un ornement obligé dans ces dernières demeures des hommes ; et aujourd’hui même, le moindre coin de terre dont peuvent disposer les familles autour de leurs sépultures n’est-il pas sur-le-champ planté de fleurs ou d’arbres ?

Mais, d’après l’aménagement actuel des cimetières de Paris, où logerait-on des arbres ? C’est tout au plus si l’on accorde entre chaque sépulture l’espace nécessaire à la construction des murs séparatifs ; on resserre de plus en plus l’espace, et ceux qui veulent planter quelques arbustes autour de leur tombeau sont obligés de ménager dans le corps de la fondation quelques petites cavités qu’on remplit de terre, à moins qu’on ne se contente, comme dans les concessions temporaires, d’élever au-dessus du sol un étroit monument, et de consacrer le reste du terrain à des plantations. Les fosses temporaires et les fosses communes, par une sorte de compensation, sont toutes garnies de quelques arbres ; car, dans les premières, les constructions n’occupant que rarement tout l’espace concédé, il y a presque toujours place pour des arbres et des arbustes ; et dans les dernières, le monument du pauvre consiste en une croix de bois peinte en noir, qu’il accompagne de quelques arbrisseaux. Que celui qui ne porte pas un cœur sec dans ses promenades parmi les tombeaux, nous dise si ces végétaux que plante la main d’un fils, d’un époux, d’un frère, ne sont pas souvent aussi éloquents que de somptueuses constructions ? Mais aussitôt le temps de la concession expiré, le marteau et la hache ont bientôt fait de ce lieu un désert.

On pourrait dire avec assez de raison que les gens préposés à la garde des cimetières ont horreur de la végétation. Il nous est arrivé maintes fois, à notre grand étonnement, de voir tel saule pleureur dont la chevelure ondoyante se balançait la veille encore sur les tombes d’alentour, se trouver tout à coup dépouillé de toutes ses branches et transformé en un tronc informe, comme si quelque génie malfaisant se plaisait à dépouiller successivement toutes les tombes du seul ornement donné par la nature. Ces gens ont-ils donc le droit de mettre ainsi en coupes réglées les arbres que des mains guidées par les sentiments les plus purs ont plantés dans le séjour des morts ? Comment, au reste, les employés subalternes respecteraient-ils les arbres qu’on voit poindre çà et là parmi les tombeaux ? Quel prix de sentiment pourraient-ils y attacher, quand ils voient l’administration ne laisser aucun espace pour en planter autour des tombes dont le terrain a été si chèrement vendu, comme si on voulait laisser briller davantage les deux maigres rangées d’arbres qui bordent les principales allées ?

La superficie du cimetière de l’Est est d’environ 24 hectares.

Quelque cynique à idées subversives, ou même quelque stoïcien à idées de bronze dira peut être : Pourquoi le domaine des morts envahirait-il celui des vivants ? Pourquoi dérober à l’agriculture des terrains précieux ? Eh ! mon Dieu ! laissons à nos arrière-petits-neveux le soin de poser les limites entre la terre des

  1. La partie A de la figure 8 indique la disposition d’un caveau dans une concession de 2 mètres, et la partie B un édicule ou chapelle élevé selon l’usage ordinaire, au-dessus du caveau, et compris exactement dans le périmètre de la concession, ainsi que l’exige le règlement. On voit par cette figure, qu’en donnant 70 centimètres de largeur intérieure à l’édifice, il ne reste que 15 centimètres de chaque côté pour l’épaisseur des murs, compris saillie du socle extérieur, et qu’en donnant la même épaisseur aux murs des extrémités, il reste 1m 70 de profondeur intérieure à la chapelle ; mais comme le caveau a ordinairement 1m 90 de long, il s’ensuit que les murs de l’édicule sont en porte-à-faux de 5 centimètres à chaque extrémité.