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celui-ci goûta de ce mets... Cet aliment mystérieux préparé par la femme de Samas-napistim à l’usage de Gilgamès, fait rêver involontairement de je ne sais quelles opérations magiques accompagnées d’étranges formules d’incantation. On croirait assister aux apprêts d’un repas, par une sorcière, sur une terre fantastique, vaguement éclairée d’un jour lunaire, où viendraient se mêler, parmi les bruits de vaisselle remuée, les signes cabalistiques et les paroles sacramentelles... Au cours du repas, Gilgamès devisait avec Samasnapistim, l’Éloigné. Comme il se réveillait à peine, il croyait continuer un rêve. Il essayait de renouer le fil de ses souvenirs : « Voyons, à mon arrivée, le sommeil m’a surpris... Puis, tu m’as touché, tu m’as frappé. » Sur quoi, Samas-napistim, tout en l’exhortant à prendre encore de la nourriture, lui raconta point par point la préparation du mystérieux aliment et le mit au courant de tout ce qui s’était passé [1].

« Gilgamès, cependant, se préoccupait de son retour. Comment ferait-il pour s’en aller ? Il ne fallait pas encore songer à partir, car son mal, loin de guérir, ne faisait qu’empirer. Pour combien de temps était-il retenu sur ces rivages ? Lui serait-il donné seulement de les quitter un jour ? « Comment sortirai-je d’ici, Samas-napistim ? La maladie s’est emparée de tous mes membres, et la mort, l’horrible mort est là debout devant mon lit à me guetter. Oh ! ce lieu que j’habite est un lieu mortel ! [2] »

« Samas-napistim prit le héros en pitié, et, s’adressant au pilote : « Amel-Ea, dit-il, la traversée a été funeste à Gilgamès. Voici qu’il se traîne languissamment

  1. Tab. XI, l. 221-242.
  2. Tab. XI, l. 243-247.