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voir le cœur, à ébranler l’imagination ; les regrets de Louise sont si amers, et aboutissent à une expiation si entière et si douloureuse ; la leçon qui en résulte est si claire et si terrible, que le léger défaut que nous venons de signaler ne laisse presque aucune trace parmi les impressions de la lecture.

On prétend qu’il est plus facile de trouver une femme qui n’ait point eu d’amour que d’en trouver une qui n’en ait eu qu’un seul. Ce petit roman semblerait confirmer la vérité de cette maxime. Louise de Senancourt est une jeune personne accomplie ; il est impossible d’avoir plus de douceur, de beauté, de dignité. Mais hélas ! une faute, une seule faute qui a marqué son entrée dans le monde, gâte tant de belles qualités. Cependant, le souvenir qu’elle en conserve, les remords qu’elle éprouve, ne la garantissent point d’une nouvelle passion : tant il est vrai qu’une fois accoutumé aux agitations de l’amour, on ne peut se faire à la tranquille monotonie de l’indifférence.

Je ne regrettais plus l’amant ;
Je regrettais encore l’amour,


a dit une femme poëte, qui apparemment s’y connaissait. Au reste, il y aurait de la cruauté à faire des reproches à la pauvre Louise ; incapable de se donner pour ce qu’elle n’est pas, elle avoue tous ses torts à son nouvel amant, et pousse la délicatesse jusqu’à refuser de l’épouser, et, qui pis est, à mourir de chagrin de ce refus.

LA DAME D’OLIFERNE, nouvelle, in-12, 1829. — La Dame d’Oliferne est un de ces livres agréables, d’une lecture vive et attachante, d’une touche légère et fine, comme les femmes en savent faire quand elles s’essayent dans le roman. La scène est dans le Jura, au moyen âge. Isoline, vassale du sir Olivier, a su plaire au vaillant baron qui l’a épousée, mais qui bientôt la délaisse pour la dame d’Arlay, veuve de haut parage et belle encore. La pauvre Isoline reste confinée dans le manoir d’Oliferne, tandis qu’Olivier brille dans toutes les joutes et les fêtes du château d’Arlay. Un soir vint à passer près du château d’Oliferne le jeune Robert de Vaudray, page et filleul du comte Robert de Vienne ; il demande à saluer la châtelaine ; elle lui offre l’hospitalité ; il accepte, et bientôt oublie le départ. Mais un jour le beau page est surpris et tué par l’époux d’Isoline ; celle-ci termine ses tristes jours dans un cloître, et Olivier, lui-même se fait moine. — Dans ce cadre bien simple, Mme  de Tercy a su retracer de touchantes peintures, et analyser avec bonheur des sentiments d’un grand charme.

On a encore de cet auteur : *Deux Nouvelles françaises, in-12, 1816. — Six nouvelles, 2 vol. in-12, 1821. — L’Ermite du mont Saint-Valentin, 2 vol. in-12, 1821. —