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second frère de M. de Balançon, auquel tous les domestiques portaient la plus vive affection. Dame Geneviève attendait surtout avec une vive impatience l’arrivée de son jeune maître, et, tout en faisant son apologie, préparait l’appartement destiné à le recevoir. Elle voulait montrer à Mlle  de Tournon cet appartement, où se trouvaient tous les portraits de la famille. Hélène y remarqua celui d’une femme de la plus grande beauté, et le considérait avec attention, lorsqu’un cri échappé à la vieille gouvernante la tire de sa rêverie ; elle se retourne, et se trouve près de M. de Varambon, occupé à la considérer. Elle le reconnaît à son extrême ressemblance avec le portrait de sa mère ; mais embarrassée d’avoir été surprise dans son appartement, elle se trouble et se retire. Cette première entrevue avait tellement prévenu M. de Varambon en faveur de Mlle  de Tournon, qu’un secret penchant l’attirait souvent vers elle ; ils se voyaient tous les jours, et Hélène ne fut pas insensible aux soins qu’il lui rendait. Cependant Auguste de Varambon avait promis à son père mourant d’embrasser l’état ecclésiastique, et déjà son oncle l’électeur de Trèves avait résigné en sa faveur les richesses de son électorat ; un regard d’Hélène a changé toutes ces dispositions de famille. Varambon, amant aimé, déclare à son frère qu’il ne veut s’engager devant les autels qu’à faire le bonheur d’Hélène. Pour déjouer ce projet, M. de Balançon écrit aussitôt à Mme  de Tournon, qui rappelle sa fille en France. Auguste fut au désespoir de cette séparation ; en quittant Mlle  de Tournon il lui laissa pour souvenir l’anneau de mariage de sa mère qu’il avait toujours porté depuis sa mort. « Je l’accepte, dit-elle : une bague de mort et de deuil doit être sacrée… » Hélène, séparée de celui qu’elle aime, arrive à la cour de Marguerite de Navarre, où tous les plaisirs d’un palais somptueux ne peuvent lui rendre les doux instants qu’elle passait près de sa sœur. Sans la consulter, Mme de Tournon promet sa main à M. de Souvré. Cependant Varambon l’a suivie en France ; à l’aide d’un déguisement, il s’introduit dans le palais qu’elle habite, lui rappelle ses serments et disparaît. Bientôt des événements politiques amènent Marguerite de Navarre à la cour de don Juan d’Autriche, où Hélène revoit celui qu’elle n’a cessé d’aimer ; mais Varambon, qui croit qu’elle consent d’épouser M. de Souvré, affecte pour elle une froideur dédaigneuse. Capable de tout supporter, excepté l’indifférence de son amant, Hélène ne peut résister à cette dernière épreuve. À peine a-t-elle quitté avec Marguerite la cour de don Juan, qu’elle expire d’amour et de douleur. — C’est sur ce fond si léger que Mme de Souza a bâti son charmant ouvrage, dont les caractères sont tracés avec beaucoup de vérité, et toujours fidèlement soutenus.

On a encore de cet auteur : Émilie et Alphonse, 3 vol. in-12, 1799.