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vrage ; histoire simple et vraie, d’une naïveté ravissante, et qui, enchâssée dans le chrysocale du roman de M. Soulié, ressemble à un diamant de la plus belle eau, mêlé à des pierres fausses dans le collier d’une danseuse. Henriette Buré est une des plus délicieuses créations de l’auteur.

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SOUVESTRE
(Émile), littérateur distingué, né à Morlaix de 15 avril 1808.


LES DERNIERS BRETONS, 4 vol. in-8, 1835-37. — Ce livre où, d’après les expressions de l’auteur, la Bretagne est peinte en pied, n’est ni une statistique, ni un mémoire, ni un roman, ni un voyage, mais un tableau complet de la Bretagne psychologique, une étude faite sur la nature d’une population dans ce qu’elle a de primitif et d’intime. La première partie de l’ouvrage de M. Souvestre est purement descriptive, c’est la Bretagne sous son aspect topographique, avec ses mœurs, ses usages et ses croyances ; la seconde est toute littéraire. L’auteur y traite des poésies populaires de la Bretagne ; il établit d’abord l’identité de la langue bretonne avec le celtique ou gaulois ; puis, se livrant ensuite à des recherches profondes sur l’ancienneté de la littérature bretonne, il nous montre les bardes armoricains, célèbres dès le VIe siècle et créant le roman chevaleresque. Les chants de la Bretagne, cités par M. Souvestre, viennent ensuite jeter leur vie et leur coloris sur le tableau qu’il nous a tracé des mœurs, des superstitions et des cérémonies de cette province. Le livre entier se distingue par des qualités brillantes : un fond plein de substance et d’intérêt y est revêtu d’un style élégant, pittoresque, animé ; c’est un livre qui sort tout à fait de la foule des productions modernes, et dont la place est marquée dans toutes les bibliothèques.

L’ÉCHELLE DES FEMMES, 2 vol. in-8, 1835. — M. Souvestre a représenté dans ce roman la vie intérieure de la femme dans quatre conditions différentes : la femme du peuple, victime de la brutalité et de la misère, et entraînée innocente dans l’abîme par son mari coupable ; la grisette, exposée aux séductions d’une vie plus élégante, développée par le cœur et par l’esprit, et retenue par la pauvreté dans une lutte inégale, dont elle ne peut sortir qu’au prix de l’estime du monde, et quelquefois d’un mépris mérité ; la bourgeoise étouffée, hébêtée par une éducation machinale ; enfin la grande dame, pervertie par le goût du plaisir et desséchée par une concession prolongée aux exigences de la prudence mondaine. De ces quatre tableaux, celui de la grisette et celui de la bourgeoise sont incontestablement les meilleurs. La femme du