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solations qu’on peut trouver au sein même des plus affreux malheurs. » Ce livre n’est donc ni un plaidoyer, ni une diatribe, ni un recueil d’anecdotes ; vous n’y trouverez pas un mot de politique, rien des motifs de cette longue et terrible persécution. Ce sont les études morales et profondes d’un prisonnier sur lui-même. Il nous peint avec naïveté ses impressions, ses angoisses, ses luttes intérieures, ses efforts, ses faiblesses, ses chutes, ses victoires. Dans le silence de son cachot, il contemple son âme avec réflexion, et l’examen qu’il fait de lui-même lui prête de nouvelles forces. À l’appui de la vertu, la religion lui apparaît comme une inspiration soudaine, et il la saisit, il l’embrasse avec étreinte. Les hommes le font bien souffrir ! et cependant il ne ressent pas de rancune ; il n’éprouve aucun sentiment d’aigreur contre l’humanité ; il l’excuse, il la plaint, mais il ne la hait pas ; il découvre jusque sous l’écorce rude et grossière de ses geôliers des qualités faites pour honorer l’homme ; son âme poétique sait embellir les objets qui l’environnent jusque sous les plombs de Venise, jusqu’au fond des cachots du Spielberg. — Ce livre est parsemé de récits on ne peut plus simples, mais remplis d’émotions naturelles. Il y règne partout une pureté d’âme en quelque sorte virginale, une délicatesse exquise d’expressions. C’est une lecture qui repose de ces œuvres galvaniques dont nous sommes inondés depuis plusieurs années, œuvres à secousses violentes, qui oppressent et suffoquent au lieu d’émouvoir et d’attendrir, qui s’adressent aux nerfs sans parler au cœur. On ne peut lire les Mémoires de Pellico sans s’intéresser vivement, sans s’affectionner à leur auteur. C’est un martyre de dix années supporté avec un courage sublime et raconté avec une simplicité vraiment évangélique ; c’est le triomphe de l’homme aux prises avec l’adversité, exposé avec une humilité toute chrétienne. Honneur à celui qui, dans cette terrible épreuve, a su se montrer si noble et si grand ! Honte à ceux qui ont pu torturer si longtemps une âme si belle et si pure.

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SISMONDE DE SISMONDI (J. Ch. Léonard),
historien et publiciste distingué, né à Genève le 9 mai 1773.


JULIA SÉVÉRA, ou l’An 492, 3 vol. in-12, 1822. — Ce drame attachant, où l’auteur a trouvé moyen de placer tant d’actions intéressantes, une peinture si vraie des mœurs du temps, des caractères si variés tracés d’une main ferme et marqués d’une empreinte originale, est un tableau complet des mœurs du Ve siècle. M. de Sismondi s’est proposé de peindre l’état des Gaules à l’époque de l’invasion de Clovis. — L’amour de Florentinus pour Julia