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a aperçu de son côté la jeune Louise de la Porte, et comme si le démon arrangeait à plaisir la rencontre, on l’a livrée à ses regards pendant cinq ou six séances, pour que sa figure soit celle de la Vierge de la Visitation. Un geste expressif entre le peintre et le modèle a été un aveu ; ils s’aiment. Le roi pourtant rêve aux moyens de satisfaire sa passion nouvelle. Son proxénète la Chenaye arrange l’affaire avec la tante, tandis que, comme contre-partie, le cardinal de Richelieu la combine en secret avec Marillac, type des beaux seigneurs d’alors, élégant, libertin, coupeur de bourses, se battant pour un mot, et embrassant son homme quand il ne le tue pas, joueur, perdu de dettes, roué, infâme, qui accepte la condition d’épouser de fait Louise de la Porte, à la charge de n’être qu’un époux nominal. Louise est si bien pressée de tous côtés, si vivement pressée par sa tante, que le mariage a lieu. Pauvre Lesueur ! le voilà désormais voué à une affection triste et solitaire ; il part ; il va laisser des chefs-d’œuvre dans toute la France ; il veut que toutes les églises du royaume aient la figure de celle qu’il rêve toujours ; il veut que tout le monde l’adore comme la mère de Dieu. Pendant cette absence, que d’intrigues pour perdre Louise, que sa candeur sauve, sinon son amour secret ! ici, c’est Marillac devenu amoureux de sa femme et jaloux de Louis XIII ; là, c’est Louis XIII dont la passion s’exalte par la résistance, et qui se défie de Marillac ; puis la Chenaye, l’âme damnée du roi, et Jacques Sirois, le sicaire du cardinal ; ensuite, sur un autre plan, Anne d’Autriche, qui insulte publiquement la favorite, qui ne l’est que de nom ; enfin, de tous côtés, un conflit d’actions qui se combattent ou qui concordent, un jeu de moyens on ne peut plus dramatiques, une fable si compliquée et si attachante, qu’on voudrait d’avance en savoir le nœud et qu’on ne le devine pourtant point. Le fond du livre est déjà riche, comme on le voit, mais les détails en sont plus riches encore : tout le règne de Louis XIII, cette cour qui danse, qui chasse, qui intrigue, qui rit, qui pleure ; cette vie de comtes, de ducs, marquis et vicomtes, qui battent le pavé ; cette politique profonde et secrète de Richelieu, qui plane sur ce règne, on trouvera tout cela dans le roman de M. Saintine.

PICCIOLA, in-8, 1836. — À l’époque de la plus grande gloire de l’Empire, le jeune comte de Charney, fatigué de la science et de l’amour, s’avise un jour de conspirer. Au lieu de le faire fusiller dans le plaine de Grenelle, on se contente de l’envoyer dans la citadelle de Fenestrelles, où on l’oublia. Un jour que notre captif se promenait dans la cour du donjon, il rencontra une faible plante qui s’efforçait péniblement de lever la tête entre deux dalles humides, et dont tout d’abord Charney eut pitié. Cette