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foyers, où ses amis et sa famille s’occupaient du rétablissement de sa santé. L’aventure des flagellants, à la suite de laquelle le chevalier de la triste figure est ramené chez lui dans une charrette, est la dernière de la première partie. Cervantes dit qu’il a fait d’inutiles recherches pour découvrir les restes du manuscrits original, où il suppose qu’il est parlé d’une troisième expédition de Don Quichotte, qui se rendit à Saragosse. Avellaneda, profitant de cette donnée, conduit le chevalier dans cette capitale de l’Aragon ; après lui avoir fait subir quelques épreuves sur la route, il le loge définitivement dans la maison des fous. Les aventures se ressemblent toutes, et la manière de les raconter ne dédommage pas de la trivialité de la fiction ; c’est une plate caricature d’un chef-d’œuvre d’imagination et de style.

La témérité d’Avellaneda rendit un service à la république des lettres, en mettant un homme de génie dans la nécessité de défendre sa gloire, et de perfectionner un chef-d’œuvre qui, sans ce motif, serait peut-être resté imparfait. Cervantes, forcé de mettre en jeu toutes les ressources de son esprit, publia la suite des folies de son héros. Le faible Avellaneda fut immolé au pied de l’autel qu’il avait profané. Peu content d’un déluge de plaisanteries dont il accabla son imprudent ennemi, Cervantes déploya sa grande supériorité en reproduisant le même personnage que son continuateur avait mis en scène, le seigneur Alvaro de Tarre. Le chapitre 72 de la deuxième partie de Don Quichotte, où se passe l’entrevue de ce gentilhomme avec le véritable aventurier de la Manche, est sans contredit l’un des plus curieux de l’ouvrage. Enfin Cervantes, voulant arrêter une fois pour toutes l’incontinence d’esprit de son adversaire, fait mourir Don Quichotte ; et le curé ordonne qu’il en soit dressé procès-verbal, afin que personne ne soit plus tenté de lui attribuer de nouvelles sottises. Voyez Cervantes.

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AYCARD (Marie).


LE COMTE DE HORN, 4 vol. in-12, 1834. — Le comte de Horn est un roman historique dans lequel l’auteur passe en revue la fameuse époque du système de Law. Antoine, comte de Horn, tenait par sa naissance aux plus nobles et aux plus puissantes familles du siècle ; escroc, libertin, perdu de dettes, à l’âge de vingt-deux ans il battait le pavé de Paris en compagnie de deux chevaliers d’industrie, nommés Laurent de Mille, capitaine réformé, et de l’Estang, fils d’un banquier de Bruxelles. Ruinés par le jeu, le vin et les femmes, ces trois hommes s’associèrent pour dévaliser un certain agioteur, qui marchait toujours pourvu d’un