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allait prendre le parti de s’éloigner, lorsqu’il est découvert et environné par plusieurs individus d’assez mauvaise mine, qu’il prend pour des faux monnayeurs, et qui ne lui laissent la vie qu’après lui avoir fait jurer d’être discret sur ce qu’il a pu remarquer dans le souterrain. Ensuite, on lui bande les yeux, et après lui avoir fait faire plusieurs détours, on le laisse tremblant de peur sur une borne, près du canal Saint-Martin. Le lendemain de cette scène, les trois étudiants reçoivent la visite de Henri Jumières, un de leurs amis, qui, après huit mois d’absence, revient pour épouser Mlle Pauline Giraudmont, fille d’un riche négociant. Henri apprenant la détresse où se trouvent en ce moment ses amis, leur avance une somme suffisante pour leur permettre d’attendre l’échéance de la pension que leur font leurs parents. Henri propose à Bouchenot une place dans ses bureaux, et, en attendant que son mariage soit conclu, il l’introduit chez de riches négociants. Bouchenot venait de prendre place à une table de bouillotte, où il s’était assis par désœuvrement, lorsqu’on annonce M. de Mortandal ; Bouchenot lève la tête, et reconnaît en lui le chef des faux monnayeurs. M. de Mortandal passe dans la société pour un riche négociant, qui a obtenu en peu de temps une fortune considérable. Bouchenot profite de la première occasion pour sortir de la maison où il vient de faire cette rencontre de mauvais augure. Le lendemain, il reçoit une lettre contenant un billet de mille francs, qu’on le prie d’accepter pour reconnaître le secret qu’il a si bien gardé, et par laquelle on le prévient que tous les mois il recevra cinq cents francs pour prix de sa discrétion. De violents scrupules s’emparent de Bouchenot, qui finit par capituler avec sa conscience, et se résigne à accepter six mille livres de rente. Il change alors de logement ; la pension est exactement payée, et il mène la vie d’un désœuvré. Un jour, en passant sur le boulevard, il rencontre Henri, qui marchait triste et pensif, et qui lui fait part que son mariage est manqué ; M. Giraudmont lui a retiré sa promesse, et dans huit jours il marie sa fille à un riche capitaliste, M. Mortandal. « M. Mortandal ! s’écrie Bouchenot, c’est à lui que M. Giraudmont veut marier sa fille ? … — Oui ! … — Eh bien ! rassure-toi, ce mariage n’aura pas lieu. » Et Bouchenot raconte à Henri toute son histoire des faux monnayeurs. Il ne s’agit plus que de surprendre Mortandal ; mais comment faire ? Bouchenot cherche en vain à reconnaître la maison où il s’est introduit ; peut-être même n’y serait-il pas parvenu, sans la rencontre qu’il fit un jour de Moustache. Aussitôt Bouchenot achète un morceau de jambon, qu’il met dans sa poche ; le chien le suit, et après plusieurs allées et venues, il le voit s’arrêter devant une petite maison que Bouchenot reconnaît pour celle où il est entré.