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coup de baguette elle a tué le serpent. Alors Antonio s’est éveillé, il m’a prise pour son ange gardien ; il me parlait les mains jointes ; je lui ai répondu que je n’étais qu’un enfant comme lui… Voilà les souvenirs qui font rêver Annunciata. — Un jour, le doge et la dogaresse montèrent dans leur gondole pour aller passer quelques heures à leur maison de plaisance de Guidena : un second rameur était dans cette gondole, c’était Antonio ; il était près d’Annunciata, il touchait sa robe, mais il savait contenir son bonheur, et ramant avec force, ne regardait qu’à la dérobée celle qu’il aimait. Le vieux Faliéro souriait d’un air de gaieté à sa jeune épouse, prenait sa main blanche et si délicate, la baisait, passait son bras autour de sa taille, et lui disait : N’est-il pas beau, mon amour, de se promener sur les flots avec le maître de cette belle Venise, avec l’époux de la mer ? mais la dogaresse n’entendait pas ses paroles, elle n’entendait, ne voyait qu’Antonio, et en rentrant dans ses appartements, elle murmura doucement : Amare ! amare ! ah ! senza amare ! Cependant le doge s’était rendu à Guidena pour organiser une conspiration ; bientôt cette conspiration est découverte, et Faliéro décapité. À cette nouvelle, Antonio se précipite dans le palais, entre dans la chambre d’Annunciata, se jette à ses pieds, couvre sa main de baisers, l’appelle des plus doux noms ; Annunciata le reconnaît, le presse contre son sein, et entre mille larmes et mille baisers, ces deux amants se jurent une foi éternelle. Ils oubliaient la terreur de cette épouvantable journée. Une barque est préparée ; Annunciata, suivie de la vieille Marguerite, sort du palais, enveloppé d’un voile épais ; elle monte dans la barque, Antonio saisit les rames, et ils s’éloignent du bord. Doux et charmant voyage ! Au ciel brillait la lune qui éclairait leur course et faisait jouer ses reflets sur les flots : mais Annunciata, telle que Hoffmann l’avait conçue, faite pour aimer, et n’ayant d’autre loi, d’autre idée que l’amour, Annunciata ne pouvait avoir dans la vie que deux moments, ne pas aimer et puis aimer. Eh bien ! sa destinée est remplie : à peine arrivée à la haute mer, Hoffmann fait s’élever une tempête horrible, qui submerge la barque et les deux amants !

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HOGG (James), romancier anglais du XIXe siècle.


CONTES DU COIN DU FEU. — L’auteur de ces contes est un de ces hommes extraordinaires dont le génie perce tous les obstacles qui s’opposent à son développement. Né en 1772, il ne reçut d’instruction que jusqu’à l’âge de huit ans. Il était d’abord vacher, et ensuite berger à Ettrich. Il est redevable d’un meilleur sort à Walter Scott, qui, s’intéressant au sort de ce poëte, formé uni-