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franchement dessinés ; mais ils manquent de cette originalité et de cet individualisme historique qui donnent à des fictions la force des réalités. On lira avec intérêt le parallèle du Rhin et de l’Hudhson, ainsi que la description du site de l’abbaye d’Einsiedlen ; mais il est peu d’autres passages dont on aimera à se rappeler la lecture : du reste ni plan, ni intrigue, ni intérêt.

LE BOURREAU, ou l’Abbaye des Vignerons, 4 vol. in-12, 1833. — Une barque élégante est à l’ancre devant les quais de la ville de Genève, pour aller porter aux fêtes des vignerons, à Vevay, les voyageurs qu’y appellent l’attrait de la curiosité ou l’intérêt du commerce. Parmi les passagers, on distingue le baron de Willading, un des notables citoyens de Berne, et sa jeune fille Adélaïde ; près de lui est un jeune militaire nommé Sigismond, auquel Adélaïde doit la vie ; à ce petit groupe vient se réunir le doge de Gênes, Gaïtana Grimaldi, ami de jeunesse du Bernois, qui regrette un fils que des inconnus lui enlevèrent dans l’âge le plus tendre. La barque porte encore un personnage important qui s’y est glissé à la faveur d’un nom supposé ; c’est Balthazar, le bourreau de Berne. Pendant la traversée la barque est assaillie par un violent orage, et sombrerait infailliblement sans les habiles manœuvres d’un étranger qui se rencontre à bord ; c’est Masso, un de ces êtres que la nature avait formés pour de grandes choses et que le vice a dégradés. Au milieu de cette crise terrible, Sigismond déploie aussi l’énergie de son âme ; il sauve des flots le baron de Willading, et empêche que Balthazar, qui a été reconnu, ne soit précipité dans le lac. Adélaïde doit tout à Sigismond : depuis longtemps elle l’aime ; du consentement de son père elle lui offre sa main ; mais l’infortuné jeune homme ne peut accepter ce qui ferait le bonheur de sa vie, il est le fils du bourreau Balthazar ! … C’est au couvent du mont Saint-Bernard, dans cet asile ouvert au voyageur au milieu des neiges éternelles des Alpes, que le dénoûment arrive, après des scènes du plus grand intérêt. Masso est accusé d’un meurtre, et les charges les plus graves sont contre lui ; il va être condamné quoique innocent, lorsqu’il déclare et prouve au seigneur Grimaldi qu’il est son fils. D’un autre côté Balthazar, éclairé par le récit même de Masso, fait des révélations qui ne permettent plus à Grimaldi de douter que Sigismond ne soit son fils. Grimaldi en effet est le père de tous deux : Masso est le fils d’une femme qu’il a séduite, Sigismond est né de la femme légitime de Grimaldi ; il a été enlevé au berceau, et, par un infernal calcul de vengeance, légué au bourreau de Berne pour être élevé comme son fils. Sigismond épouse Adélaïde, et Masso, rendu à la liberté, s’éloigne pour ne plus reparaître.

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