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mœurs, par une désuétude soudaine de tous les usages imités de l’Angleterre, par une abstinence de produits illégalement taxés ; cette lutte, qui ne se savait pas tant d’avenir, est habilement esquissée par Cooper. Il peint avec vivacité ces petites escarmouches qui donnèrent goût à la guerre, et montrèrent, par de terribles suites, combien est enivrante la première effusion du sang. — Le roman roule presque tout entier sur les crimes d’une vieille femme, dont la mort termine un drame bien noir, où l’on trouve quelques scènes énergiques du genre d’Anne Radcliffe. Le jeune major Lincoln revient d’Angleterre à Boston, son pays natal, avec des sentiments d’amour et de dévouement pour son roi ; il fait la traversée avec un vieillard nommé Ralph, qui chérit, au contraire, la cause de l’indépendance, et qui prend néanmoins sur son jeune compagnon un ascendant irrésistible. Lyonel devient amoureux de sa cousine Cécile Dynévor, qu’il épouse plus tard ; et ce mariage est pour lui l’occasion qui amène la connaissance d’une série de crimes commis dans sa famille, dont le résultat avait été la mort et la diffamation de sa mère, et la réclusion de son père dans une maison de fous. Son père n’est autre que le vieux Ralph, qui meurt au moment où on le reconnaît, frappé de trois coups de couteau par son geôlier de Londres, qui l’a suivi on ne sait comment. Cette suite d’atrocités n’est évidemment que le cadre du tableau où l’auteur a voulu peindre la confiante présomption des chefs anglais, la conduite imprudente de leurs troupes ; et, d’un autre côté, l’exaspération, le dévouement et l’activité des Américains.

LE DERNIER DES MOHICANS, 4 vol. in-12, 1826. — Duncan Heyvard, jeune officier anglais, s’est chargé de reconduire à leur père deux jeunes filles, Alice et Cora. Il a pris pour guide le Renard subtil, sauvage perfide qui les égare à dessein ; alors il s’adresse, pour demander son chemin, à un chasseur qu’il trouve conversant avec deux Indiens de la tribu des Delawares ; ce chasseur a reçu le nom d’Œil de Faucon, ou la Longue carabine. Issu de chrétiens, chrétien lui-même à sa manière, il est presque devenu Indien ; mais, dans sa loyauté, il n’a pu s’attacher qu’aux Delawares, dont peu de vices souillent les vertus. C’est avec les deux chefs de cette tribu, Le Grand Serpent et le Cerf agile, son fils, qu’il conversait lorsqu’il fut questionné par Heyvard. Il lui fait comprendre la trahison du Renard subtil, et se trouve forcé de lui servir de guide avec ses deux amis, les deux seuls restants de la famille des Mohicans. L’auteur met alors sous les yeux du lecteur une multitude de scènes tantôt gaies, tantôt terribles, propres à peindre le caractère et les habitudes des sauvages sous tous les aspects possibles. Il engage un grand nombre de combats,