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de poésie que chez son devancier. Pour lui, l’Irlande n’est point cette île enchantée, cette verte Erin, que les poëtes ont si souvent chantée ; il dépouille ses habitants de cet idéal de patriotisme énergique et de verve spirituelle auquel nous ont habitués les romans de Banim et de lady Morgan. Une sorte de pessimisme moqueur inspire tous les récits qu’il fait de leurs conspirations, de leurs émeutes contre l’oppression anglaise ; mais ce n’est certes point par sympathie pour celle-ci, car ses partisans n’obtiennent pas grâce devant son inexorable pinceau. Ainsi, dans les Cardeurs, Arthur Dillon se laisse d’abord aller à l’enthousiasme patriotique qui s’accorde si bien avec tous les sentiments de son jeune âge ; puis, la lâche cruauté, l’égoïsme grossier des séditieux subalternes, parmi lesquels il se trouve quelque temps compromis, viennent dissiper ses rêves d’indépendance, ses flatteuses espérances de liberté, et lui rendent de plus en plus cher le bonheur tranquille de la vie privée. Ce caractère contraste singulièrement avec celui du maître d’école O’Rourke, pour qui les troubles populaires ne sont qu’un moyen d’ambition personnelle ; avec ceux des ignobles conspirateurs dont les crimes ne sont rachetés par aucun dévouement, par aucune générosité ; et surtout avec les caractères de lord Castletown et du révérend Crostwaithe, que de bas intérêts ont réunis aux oppresseurs.

LE CONEMARA, ou Une élection en Irlande, in-12, 1830. — Le Conemara est une sorte de caricature vive et gaie, chargée avec esprit, mais dont on regrette de ne pas comprendre entièrement le sens ; quelques notes auraient pu expliquer les allusions qu’elle doit renfermer, et nous apprendre ce que nous devons croire des merveilleux récits de l’auteur sur le roi Mac Loughlin et sa monarchie sauvage.

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CUELLET (Mlle Adèle).


LE VOILE, ou Valentine d’Alté, 3 vol. in-12, 1813. — Le Voile est un de ces romans qu’une femme seule pouvait écrire, et dont une analyse ne peut donner qu’une idée très-imparfaite. La jeune et belle marquise d’Alté, veuve d’un mari joueur, qui l’a laissée dans la misère, habite à Montpellier la maison du docteur Dacy, doyen de la faculté de médecine de cette ville. Un jeune et bel Anglais, lord Cherbury, arrive dans la même maison, mourant des suites d’une passion malheureuse. Le lait de femme est le seul remède qui puisse le rappeler à la vie. Mme d’Alté, qui est veuve depuis quelques mois seulement, est accouchée d’un fils peu de temps après la mort de son mari, et ce fils lui-même vient de mourir. Mme d’Alté n’a rien au monde que des dettes ; elle ne subsiste que