Page:Revue des Romans (1839).djvu/120

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dige dans le monde frivole et insignifiant au milieu duquel elle vivait. Des idées sur une foule de choses, qui n’avaient jamais fait l’objet de ses réflexions, parurent d’abord à Géraldine la transporter dans un monde nouveau. Les opinions de Fitz Osborn étaient sans doute loin de satisfaire sa raison et surtout son cœur, mais souvent elles l’embarrassaient et la laissaient sans réplique. Plus souvent encore elle les regardait comme un travers d’esprit qui n’allait point à l’âme ; il n’y avait donc que son esprit à convertir, et Géraldine ne s’en attachait que plus fortement à celui qu’elle aurait désiré persuader. Enfin, elle n’aimait pas précisément Fitz Osborn, mais c’était à lui qu’elle avait besoin de communiquer ses idées, de faire approuver ses sentiments. Quel était donc ce Fitz Osborn qui exerçait un tel ascendant sur l’esprit de cette femme supérieure ? Fitz Osborn était un odieux scélérat, une sorte de Lovelace, mais aimable ; moins brillant que son modèle, mais spirituel cependant, qui finit comme lui par enlever sa victime et qui lui donne un narcotique ; tout enfin se passe dans le roman à l’égard de la malheureuse Géraldine comme à l’égard de l’infortunée Clarisse. Géraldine succombe sous l’excès de ses maux, et meurt de regret d’une faute involontaire, mais dont elle s’accuse cependant, parce qu’un peu d’imprudence et de vanité de sa part avait merveilleusement secondé les perfides machinations de son séducteur. Fitz Osborn, pour éviter le ressentiment d’un mari outragé, passe en France où il avait des amis parmi les philosophes et les républicains ; mis en état d’arrestation à l’époque de la terreur, il s’empoisonne pour échapper à l’échafaud. — Géraldine est un roman qui eut un grand succès lors de son apparition, et qui mérite sous plusieurs rapports d’être classé parmi les bonnes productions de l’époque où il parut.

LE NAUFRAGE, traduit de l’anglais, 3 vol. in-12, 1811. — Un vaisseau de la compagnie des Indes, faisant route de l’Angleterre au Bengale, se brisa sur une chaîne de rochers au milieu de l’océan Indien. Deux femmes, échappées à cette terrible catastrophe, furent jetées dans une île déserte. Lady Garlingford et sa fille, la jeune et belle Viola, trouvèrent dans l’île de quoi soutenir leur existence, et finirent, après quelques temps, à s’accoutumer à leur position. Un jour Viola lisait à sa mère un ouvrage échappé du naufrage, lorsqu’un oiseau, percé d’une flèche, vint expirer aux pieds de lady Garlingford. Supposant alors que l’île était habitée par des sauvages, sans en rien dire à sa fille, qui n’avait pas aperçu l’oiseau blessé, lady Garlingford prit le parti de parcourir l’île pour s’assurer s’il s’y trouvait d’autres habitants. Ses recherches furent d’abord inutiles ; mais quelques jours après elle découvrit un jeune officier, échappé comme elle au naufrage, qui