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kilomètres, les adversaires s’abritèrent, s’enfoncèrent dans la terre, cherchant à se rendre invisibles et à suppléer au nombre par des fortifications improvisées.

C’est alors que le général Bourgeois proposa au général Joffre d’adapter, autant que ce serait possible, à la guerre de position que l’on venait d’inaugurer, les procédés de préparation de tir en usage dans la guerre de siège. A cet effet, et dès le 1er  novembre 1914, fut recruté, parmi les officiers du Service géographique et les ingénieurs du Service hydrographique de la marine, ce qu’on a appelé « les groupes de canevas de tir. » Cette dénomination, sans signification exacte par elle-même, se vulgarisa vite sur le front pour désigner ce qui était, en fait, une succursale du Service géographique. Avant la guerre, on n’entendait par « canevas de tir » que le guide topographique du tir de l’artillerie, plus spécialement pour le tir indirect, c’est-à-dire sur des objets invisibles, qu’ils soient à contrepente ou dissimulés seulement.

Dès 1908, on avait prévu qu’en cas de siège des places allemandes, et particulièrement de Strasbourg, Metz et Thionville, il serait nécessaire d’adjoindre à chacune de nos armées assiégeantes une équipe d’officiers spécialisés, dont les travaux permettraient à notre tir d’atteindre principalement les batteries d’artillerie et les abris de munitions ennemis, toujours cachés soigneusement. Il appartenait donc à ces officiers de découvrir, par tous moyens optiques et géodésiques ou renseignements oraux, les arcanes de la forteresse, puis de les situer sur une carte amplifiée. On en découpait ensuite la portion qui intéressait chaque chef de batterie.

Des cartes d’Alsace-Lorraine, à grande échelle, très claires, nous n’en manquions pas. Nous nous en étions procuré d’autant plus plus facilement que l’état-major allemand en avait autorisé la vente dans le commerce : ces cartes (au 25 000e) étaient établies à une échelle environ trois fois et demi plus grande que notre unique carte d’état-major (au 80 000e). On pouvait par conséquent y porter avec beaucoup plus de clarté les adjonctions utiles au bon fonctionnement du « canevas de tir. » Pour opérer ailleurs qu’à Strasbourg, Metz et Thionville, nous ne possédions que notre carte d’état-major, bonne sans doute pour tracer ou suivre un itinéraire ; mais faible ressource présentement. D’ailleurs, son insuffisance, voire