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objets sans contact, et par l’intermédiaire d’une force ou d’un rayonnement non encore décelés et émanant de leur organisme, si ces individus étaient d’ailleurs capables de produire des sortes d’efflorescences, des ectoplasmes émanés d’eux, et affectant des formes humaines, en quoi, encore un coup, ces faits insolites renverseraient-ils les données acquises par la science positive ? Je défie qu’on le montre.

Nous n’entrons dans l’impossible et dans l’absurde, ou du moins dans « le contradictoire à la science, » que lorsque nous admettons, non plus seulement l’existence de ces faits, mais certaines des explications qu’on en a données, certaines des théories qu’on en a proposées. Ce sont ces théories, ces explications qu’il y aurait lieu éventuellement de rejeter au nom de la science, mais non pas les faits eux-mêmes, si leur existence est prouvée.

Tout est là : les faits métapsychiques allégués, la télékinésie, l’ectoplasmie, la cryptesthésie sont-ils des phénomènes réels ?

Telle est la première, la seule question que puissent et que doivent se poser dans ce domaine les hommes de science dignes de ce nom. C’est l’avis du professeur Richet : « Si nous voulons que la métapsychique soit une science, commençons par établir fortement les faits. »

Tout est là encore un coup, et rien que là

Lorsque l’illustre physicien anglais Crookes, célèbre par ses découvertes dans la science positive, commença à publier (de 1869 à 1872) les faits remarquables qu’il crut avoir observés avec certains médiums, il s’écria : Je ne dis pas que c’est possible, je dis que cela est.

Retournant en quelque sorte ce mot célèbre, il me semble, à la lumière des considérations précédentes, qu’on doit aborder l’étude des faits de cet ordre en se disant : « Je ne dis pas que c’est impossible, je dis qu’il faut prouver que cela est. »

Or il n’est que deux manières de rechercher cette preuve : 1o l’expérimentation et l’observation personnelles ; 2o l’étude des témoignages des autres expérimentateurs et observateurs. Cette deuxième méthode nous conduira à une critique serrée des témoignages ; elle nous montrera d’ailleurs que si l’on peut invoquer de très hautes autorités contre la réalité des faits allégués, on en peut invoquer de non moins éminentes en sens contraire. Quant à l’expérimentation et à l’observation, il y aura lieu de préciser les conditions nécessaires pour les rendre probantes.

Car si les principes sont ici incontestables, il n’en est pas encore de même des faits. Car tout le possible n’est pas nécessairement réel.