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va pouvoir enfin entrer en scène pour exploiter la victoire. Si bien que, lorsqu’on se demande si l’achèvement de la bataille et la poursuite de l’ennemi vaincu par la cavalerie sont encore possibles dans la guerre moderne, on ne peut tirer de la Bataille de France que des indications, mais non une réponse indiscutable, un argument décisif.

Cet argument, nous pouvons cependant le trouver sur d’autres théâtres d’opérations, dans cet Orient qui, de tout temps, fut le théâtre des chevauchées légendaires. Le matériel (mitrailleuses et canons) allait-il, là aussi, gêner l’essor de l’arme à cheval ? Au contraire, il devait lui fournir l’occasion de succès immenses, tels que jamais elle n’en avait obtenus avec la seule arme blanche.

Bien qu’il s’agisse ici d’exposer les actions accomplies par la cavalerie française, nous nous permettrons d’emprunter à la cavalerie anglaise un exemple qui montre tout le parti qu’on peut, le cas échéant, tirer de notre arme, et qui met en relief les qualités de vigueur, de mordant et d’audace de nos frères d’armes britanniques.

En raccourci, voici l’épopée.

Le 19 septembre 1918, l’armée britannique prononce son offensive générale contre le front turc de Palestine, étendu de Jaffa au massif du Haman, appuyé à des obstacles quasi infranchissables, la mer Méditerranée et le désert.

Le plan est de faire brèche dans le dispositif ennemi, afin d’ouvrir la porte à la cavalerie qui, dès le début de l’attaque, est prête à se porter en avant.

Le front est percé au premier choc.

Alors la cavalerie[1] « prenant un bon départ, » ainsi que le dit le général Allenby, commandant l’armée britannique, s’élance dans la brèche ouverte, débouche sur les arrières de l’armée turque, fait irruption le 20 à Nazareth où est le Quartier Général de Liman von Sanders, commandant allemand des forces opposées. Et celui-ci s’échappe à grand’peine, en automobile, laissant aux mains des cavaliers une partie de son État-Major. Une autre fraction de la cavalerie, opérant par rabattement en arrière du front ennemi, coupe les communications des troupes attaquées en tête par l’infanterie montée. Dès le

  1. 4e et 5e divisions, division australienne, brigade hindoue, régiment français de marche du Levant.