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n’avait aucun lien de parenté directe avec Mme Récamier ; mais elle était la petite-nièce du mari de celle-ci, le banquier Jacques-Rose Récamier. Cette famille des Récamier, originaire du département de l’Ain, était nombreuse : Jacques Récamier avait deux frères et trois sœurs ; l’une d’elles, Marie-Antoinette Récamier, était revenue se marier en Bugey avec son cousin germain, Anthelme Récamier. médecin de l’hôpital de Belley ; de cette union était née Mariette Récamier qui épousa le docteur Cyvoct et fut la mère de la petite Amélie. Celle-ci fut confiée, à l’âge de sept ans, à Mme Récamier, dans les circonstances dont on lira le récit, et depuis lors ne quitta plus sa tante, sauf pendant l’année 1818 qu’elle passa au couvent du Sacré-Cœur. Elle l’accompagna à Châlons et à Lyon, puis pendant son premier voyage en Italie, revint avec elle à Paris en 1814, la suivit plus tard à l’Abbaye-aux-Rois lorsque des revers de fortune obligèrent Mme Récamier à s’y retirer, vivant toujours avec elle dans l’intimité la plus étroite ; elle devint sa fille adoptive et sa confidente, — Barbey d’Aurevilly a dit irrévérencieusement : son chef de cabinet ; — elle connut tous les amis qui entourèrent Mme Récamier pendant la seconde partie de sa vie. Après la mort de sa tante, Mme Lenormant publia sur elle, ses amis et sa correspondance, une série d’ouvrages qui présentent cet intérêt d’avoir été écrits par une personne qui avait plus qu’aucune autre approché Mme Récamier et qui avait entre les mains tous les papiers laissés par celle-ci.

Si les fragments de Souvenirs que nous donnons aujourd’hui n’apportent pas de renseignements vraiment nouveaux sur les événements qu’ils racontent, et les personnes qu’ils peignent sont déjà connus, peut-être cependant ne paraîtront-ils pas dépourvus de tout intérêt. Ils sont, en effet, la traduction directe des impressions produites par les gens et les choses sur un esprit très jeune, indiscutablement intelligent et observateur. Ils ont été écrits sous l’influence immédiate des événements, au jour le jour, sans aucune prétention littéraire, par une jeune fille de dix-huit ou dix-neuf ans. Et ceci leur donne un accent de vérité et de vie, une fraîcheur de sensation, une vivacité d’expression que l’on ne retrouve peut-être pas au même degré dans les livres que, trente-cinq ans plus tard, la même personne écrivait pour le public. Il n’y a aucune prétention de style, mais parfois des mots