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poursuivait depuis plusieurs années. Contre l’impérialisme napoléonien, l’Allemagne n’avait que trop de griefs ; aujourd’hui, c’est de son seul impérialisme qu’elle porte la peine ; mais, au lieu de reconnaître ses torts, elle trouve plus simple de nous accuser, et elle pense qu’une propagande calquée sur celle d’autrefois lui rendra les mêmes succès. Resterons-nous indéfiniment les spectateurs inertes de cette mobilisation à lointaine échéance ? Attendrons-nous que l’Allemagne soit redevenue forte et redoutable pour exiger son désarmement et l’exécution stricte du traité qu’elle a signé ?

Il ne saurait plus être question, j’imagine, malgré les bruits qui courent, de mettre fin à la mission du général Nollet et de ses collègues alliés. La présence de la Commission de contrôle est de plus en plus nécessaire en Allemagne et même il ne serait pas inutile que ses moyens de surveillance fussent sensiblement renforcés. Mais il ne suffit pas qu’elle puisse exercer un contrôle efficace. Il faut que ses injonctions soient suivies d’effet, et c’est aux Gouvernements alliés qu’il appartient de prendre toutes mesures pour que le désarmement de l’Allemagne, condition essentielle et primordiale du rétablissement de la paix, devienne enfin une réalité. M. André Lefèvre, ancien ministre de la Guerre, qui avait, avant le vote du traité, dénoncé l’insuffisance des dispositions qui ont trait à cette question capitale, a lumineusement montré, depuis de longs mois, les complaisances excessives que nous avions témoignées à l’Allemagne dans l’application de ces clauses déjà trop larges. De nouveaux retards ne seraient plus tolérables. Au point où nous en sommes, il s’agit de savoir si nous laisserons l’Allemagne revenir tranquillement au militarisme, forme naissante de l’impérialisme belliqueux, ou si nous l’arrêterons dans cet audacieux retour au passé. Il n’y va pas seulement de la sécurité de la France, il y va de la paix du monde ; mais, pour nous, qui avons bien le droit de nous occuper, d’abord, de nos intérêts et de veiller sur notre vie, nous ne pouvons pas ne pas nous dire que, le pacte d’assistance signé par MM. Wilson et Lloyd George étant aujourd’hui lettre morte et chacun de nos alliés redescendant peu à peu, par une pente fatale, à « l’égoïsme sacré, » nous devons, à tout prix, si nous voulons travailler dans le calme, obtenir le désarmement immédiat et total de l’Allemagne. Ce n’est pas là un problème dont la solution puisse être remise au lendemain. Chaque jour qui passe le complique à nos dépens.

M. Clemenceau nous a, il est vrai, laissé entendre à Sainte-Hermine que nous trouverions, au besoin, plus tard, dans