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supprimant on permet à la brise de mer de circuler. Ils conviennent qu’il n’y a pas d’ombre chez eux, mais ils ajoutent qu’il suffit de rester couché pendant les heures brûlantes. Il faut d’ailleurs convenir que Punta del Este est un des plus beaux paysages du monde. Imaginez, dans une mer d’un bleu éblouissant, un promontoire bas, dont les récifs ont une ceinture d’écume : quelque chose comme la pointe du Raz ramenée au niveau de l’eau. Le promontoire est si effilé qu’on s’y trouve au milieu des flots, comme sur une barque, et que la mer fait tout le paysage autour de vous : les automobiles roulent jusqu’au bord des eaux, jusqu’aux rochers mouillés. Sur le côté gauche, elle déferle avec une violence sauvage ; mais sur le côté droit, une île s’est soudée au cap par une bande de sable, et le tout a formé une anse abritée où la mer est calme comme un lac ; de telle sorte que Punta del Este a deux plages, une douce et une rude, séparées seulement par la langue du terre où est la ville.


III. — UNE SOCIÉTÉ PASTORALE AU XXe SIÈCLE

Revenons au pays lui-même. Nous n’avons pas à tenir compte des éléments indiens qui peuplaient le pays avant l’établissement des Espagnols et qui ont disparu aujourd’hui, du moins en tant que peuple. C’étaient principalement des Charruas, de race guaranie. Assez agiles pour prendre un cerf à la course, ils étaient extrêmement guerriers. Ils allaient nus, vivant de la chasse et de la pêche, vivant sous des tentes de cuir, sans gouvernement et sans chef, sauf pendant les expéditions ; mais, la guerre finie, le chef se confondait avec ses soldats. Ils ignoraient absolument l’agriculture et l’élevage. Ils ensevelissaient les morts avec leurs armes, pour les chasses et les combats de l’autre monde. Ils avaient la notion d’un être suprême qu’ils appelaient Tupâ, ce qui veut dire : « Qui es-tu ? » Ils croyaient aussi à un génie du mal.

Le premier qui débarqua chez eux fut un navigateur andalou, Diaz de Solis, qui prit terre en 1516 avec cinquante hommes, à l’embouchure de l’Uruguay. Il fut massacré. Magellan en 1520 visita le Rio de la Plata. Un de ses matelots, en voyant le Cerro, se serait écrié : « J’ai vu une montagne : monte vidi eu. » Et le nom serait resté à la baie où s’élève aujourd’hui Montevideo.