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installée à Briançon, dans la haute ville, avait ses cantons en place, sa circulation réglée, et, avec l’aide des autorités territoriales françaises et italiennes, assurait le déblaiement du col, qui devait rester libre tout l’hiver. Pendant ce temps, quatre autres groupes automobiles faisaient passer aux troupes le col de Tende.

Moins de deux semaines plus tard, l’armée d’Italie tout entière, groupée à l’Est et au Sud du Lac de Garde, disposait d’une organisation automobile complète, avec les huit groupes de son Service automobile d’armée, son parc installé à Brescia, toutes ses voitures de tourisme, ses voitures de ravitaillement en viande, ses sections sanitaires, complétées par les Groupes chirurgicaux et les Équipages radiologiques, ses sections de transport de personnel télégraphique (T. P. T.).

Une Commission Régulatrice Automobile nouvelle organisait en « route gardée » l’itinéraire Vérone, Vicence, Citadella, Castelfranco, prête à mettre en action quatre nouveaux groupes qui allaient arriver, après avoir terminé leur tâche dans les Alpes maritimes. On peut dire que la rapidité de cette mise en place fait honneur à l’activité et à l’ingéniosité du service automobile français tout entier.

Les convois arrivèrent à pied d’œuvre sans déchets. Beaucoup avaient d’anciens et braves conducteurs qui, en 1914 et pendant toute l’année 1915, avaient fait les transports de Flandre, d’Artois, de Champagne, en 1916 Verdun et la Somme, en 1917 l’Aisne : c’étaient de vieux routiers. Il est certain que ceux qui passèrent par le Sud trouvèrent un singulier réconfort dans la beauté des paysages et dans l’accueil chaleureux des populations : pour des gens qui venaient des bords de la Vesle, le cantonnement à Menton et à Bordighera « n’avait rien de pénible ! » — Mais quant à ceux qui furent lancés dans les neiges du Nord, un peu surpris tout d’abord, ils se ressaisirent bien vite ; et ils déclaraient, ensuite, en riant, que c’était bien moins « malin » de passer les Alpes en novembre que d’aller tout simplement, à de certains jours d’avril, de Jonchery à Concevreux !

Et peut-être disaient-ils vrai.

Paul Heuzé.