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butte à la politique agressive du parti de la guerre au Tsong-Li-Yamen, est maintenant résolue à s’emparer du Tonkin tout entier par la force des armes, si la Chine ne consent pas à le lui céder, de bonne grâce, par un traité de commerce et de bon voisinage, également avantageux de part et d’autre et ne pouvant donc plus lui porter ombrage.

« En acceptant une occupation partielle de ce pays, limitée, par exemple, au delta du Fleuve Rouge et à une portion de son cours vers Lao-Kay, comme dans le projet du traité Bourée, nous devrions, en effet, renoncer, pour l’avenir, à toutes relations commerciales avec la Chine, à travers la région montagneuse environnante, que les Pavillons-noirs et la piraterie, dont elle est le siège permanent, rendraient impénétrable à nos commerçants et qui enlèverait toute sécurité à nos possessions ainsi encerclées.

« La Chine a grand besoin de se faire une amie de la France, dans l’Annam et le Tonkin, pour éviter qu’elle y devienne une voisine mécontente et hostile, intéressée à prêter, à l’occasion, un concours efficace, par ses menaces notamment sur les frontières méridionales de l’Empire, aux empiétements toujours à craindre de la Russie ou du Japon, sur ses frontières opposées, beaucoup plus rapprochées de Pékin.

« Il importe donc que Li-Hong-Tchang, l’homme d’Etat le plus qualifié pour ce rôle, intervienne à nouveau, mais cette fois pour convenir avec nous d’un arrangement définitif et durable, dans les conditions que je viens de définir : c’est pour lui le vrai moyen de détourner, des frontières et des eaux chinoises, le danger permanent d’une guerre que les forces de terre et de mer actuelles de la Chine seraient sûrement impuissantes à soutenir.

« En tout cas, ajoutai-je, ce que le vice-roi doit faire, avant tout, c’est de nous débarrasser du marquis de Tseng, à Paris. Le marquis ne cesse de brouiller les cartes pour empêcher toute entente entre la France et la Chine au sujet du Tonkin, à l’instigation de la diplomatie anglaise, systématiquement hostile à notre extension coloniale, et dont il prend le mot d’ordre à Londres, son autre poste d’ambassadeur en Europe. »

Ces déclarations catégoriques, répétées par mon interlocuteur au vice-roi de Canton, qui les avait transmises à Li-Hong-Tchang, suggérèrent au vice-roi de faire appeler M. Détring en mission