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même, sur ces rives fatidiques du Rhin où s’enchaîne l’histoire des peuples, nous avions pour nous aider à monter la garde l’un d’entre eux, loyal soldat autant qu’habile diplomate, animé des meilleures intentions à l’égard de l’ennemi vaincu, mais non au point de lui sacrifier les droits sacrés du camarade vainqueur, à la modération duquel il lui a plu tant de fois de rendre hommage. Ce chef, ce fidèle ami de la France, le général Allen, n’hésita pas à ouvrir l’enquête qui s’imposait. Il le fit en toute impartialité. Et son rapport transmis à Washington, publié, commenté, asséna de rudes coups aux misérables auteurs du scénario berlinois. M. Dresel, commissaire américain à Berlin, que son gouvernement avait chargé d’une mission analogue, ne se montra pas moins catégorique dansées conclusions, comme il résulte du rapport transmis au sénateur Lodge par M. Mormann H. Davis, secrétaire d’Etat par intérim[1].

D’autre part, le général Pershing, — qui nous a vus à l’œuvre, qui nous connaît et nous estime, — Pershing, l’entraîneur de ces quinze cent mille Yanks débarqués chez nous avec quelque chose de la foi des Croisés ; Pershing, dont le premier geste sur la terre de France fut de saluer l’ombre glorieuse de La Fayette ; Pershing, le noble guerrier de la seconde Marne, ralliait à lui les héros de sa Légion et leur demandait de faire échec à nos diffamateurs…

Tout est bien qui finit bien. Mais tout est-il bien fini ? Ce serait mal connaître nos adversaires, leur ténacité, leur perpétuel besoin de chicane que de les supposer battus sans esprit de revanche. L’évidence est là. Pour nous en tenir aux faits les plus récents, c’est la Chambre bavaroise qui, le 23 juin dernier, déclare qu’elle considère « comme un devoir moral des plus impérieux d’ajouter un éclatant témoignage de son indignation aux nombreuses protestations inspirées par la dou-

  1. Si l’on veut être fixé sur le compte des Morel et des Beveridge, ce sont les conclusions de M. Dresel qu’il faut consulter. Il écrit textuellement : « Miss Ray Beveridge fut naguère employée par l’ambassade allemande à Washington et c’est elle qui organisa en 1915 les réunions de la « conférence pour l’embargo. » En parlant de l’ex-empereur d’Allemagne, elle l’appelle « mon Kaiser. » Quant à Morel, il était avant la guerre anti-français et anti-belge. Au moment de la crise marocaine, il soutint l’Allemagne et, pendant la guerre, il fut inculpé aux termes du Defence of the Realm Act pour avoir envoyé en Suisse des lettres non censurées. Ses articles sur la « Terreur noire » furent publiés dans le Daily Herald, de Londres, journal d’un radicalisme extrême, qui passe pour être à la solde du gouvernement russe des Soviets. »