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SUR L’ESPACE ET LE TEMPS SELON EINSTEIN.

sur les faits (si contradictoires soient-ils) que notre démonstration du raccourcissement nécessaire des objets par leur vitesse relative à l’observateur, est forte.

Nous comprenons maintenant le sens profond de la contraction de Fitzgerald-Lorentz. Cette contraction apparente n’est nullement due au mouvement des objets par rapport à l’éther ; elle est essentiellement l’effet des mouvements des objets et des observateurs les uns par rapport aux autres, des mouvements relatifs, au sens de la vieille mécanique.

Les plus grandes vitesses relatives auxquelles nous soyons habitués dans la pratique de l’existence sont inférieures à quelques kilomètres par seconde (la vitesse initiale de l’obus de la Bertha n’était que d’environ 1 300 mètres par seconde). Pour de si petites différences de vitesse, la contraction relativiste est complètement négligeable, et c’est pourquoi, ne l’ayant jamais constatée, la mécanique classique a considéré la forme et la dimension des objets rigides comme indépendante des systèmes de référence.

C’était à peu près vrai. C’est là toute la différence qu’il y a entre le vrai et le faux. Dire que 999990 + 9 = 1 million, c’est dire quelque chose d’à peu près vrai, donc de faux. Quand la rotondité de la terre fut démontrée, cela ne changea assurément rien aux procédés des architectes, qui construisent encore leurs bâtisses comme si la direction marquée par le fil à plomb était toujours parallèle à elle-même. Pareillement nos fabricants de locomotives et d’avions n’auront pas de longtemps à considérer les formes de leurs machines comme dépendant de leurs vitesses. Qu’importe ! Le point de vue de la pratique n’est et ne doit être celui de la science que par ricochet. Tant pis s’il n’y a pas de ricochet, ou s’il est tardif.

D’ailleurs, on a découvert depuis quelques années, ici-bas, des mobiles dont les vitesses, relatives à nous, atteignent des dizaines, des centaines de milliers de kilomètres : ce sont les projectiles des rayons cathodiques et des rayons du radium. À ces vitesses, la contraction relativiste est très notable. Nous verrons comment, effectivement, elle a été notée.

Récapitulons ce qui est maintenant acquis :

Les objets apparaissent déformés par la vitesse, dans le sens