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Il en résulte que le wagon ou, d’une manière générale, un objet quelconque est raccourci par sa vitesse et dans le sens de sa vitesse par rapport à l’observateur. La même chose a lieu évidemment si c’est l’observateur qui se déplace devant l’objet, puisqu’on ne peut connaître que des vitesses relatives, en vertu du principe de relativité classique de Newton et de Galilée.

Sous cet aspect nouveau, on voit que la contraction de Lorentz-Fitzgerald devient une chose intelligible ou du moins admissible. Cette contraction n’est plus la cause du résultat négatif de l’expérience de Michelson ; elle en est la conséquence. Tout s’en trouve clarifié, et on comprend maintenant qu’il y avait, dans la façon classique d’évaluer la dimension des objets, quelque chose d’incorrect.

Certes, le fait que des rayons lumineux, animés de vitesses différentes à leur départ de leurs sources, aient toujours en arrivant à notre œil des vitesses identiques et indiscernables, est étrange et heurte quelque peu nos vieilles habitudes d’esprit. Si j’ose employer une comparaison qui est seulement destinée à faire penser, mais nullement à expliquer, il y a là peut-être quelque chose d’analogue à ce qui se passe avec les bombes d’avions. Des bombes d’un modèle donné, qu’elles soient lâchées par l’avion d’une hauteur de 5 000 mètres ou d’une hauteur de 10 000, et qui, par conséquent, ont à 5 000 mètres du sol des vitesses de chute fort dissemblables, ont toujours en arrivant au sol la même vitesse restante. C’est l’effet modérateur, égalisateur, de la résistance de l’air qui empêche la vitesse de s’accroître indéfiniment et la rend constante lorsqu’elle a atteint une certaine valeur. Faut-il admettre qu’autour de notre œil, autour des objets, il y a une sorte de champ de résistance qui impose à la lumière survenante une limite semblable ? Qui le sait ? D’ailleurs ces questions n’ont peut-être pas de sens pour un physicien. Celui-ci ne peut connaître et ne connaîtra le comportement de la lumière qu’à son départ de la source matérielle et à son arrivée à l’œil armé ou non d’instruments. Il ne peut savoir comment se comporte sa propagation dans l’espace intermédiaire dénué de matière. Plus d’ailleurs nous approfondirons la nouvelle physique, plus nous constaterons qu’elle puise presque toute sa force dans son dédain systématique de ce qui n’est pas phénoménal, de ce qui n’est pas expérimentalement observable. C’est parce qu’elle est basée uniquement