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nous. C’est extraordinaire ce qu’il y a de « marguerites » dans les prés et d’herbe folle dans les blés ! On voit que les laboureurs ont ici trop d’espace à mettre en valeur. Toutes les maisons sont en bois ; le bois abonde au Canada où la forêt primitive s’étend à l’infini tout autour des régions où le sol a été défriché. On nous raconte que les choses se passent à peu près partout de la même façon : le premier colon qui arrive construit une hutte ; quelques années après, la hutte est devenue le poulailler d’une maison de bois très confortable bâtie tout auprès ; encore un peu de temps et de ci de là les villages se formeront. Mais dans la région que nous traversons, terre déjà ancienne, les paysages sont ceux de chez nous ; on pourrait se croire en Normandie ou dans l’Ile de France. Cependant nulle part des haies ou des murs ; les champs sont séparés par de petits fossés, sillons plus larges que les autres ; par endroits les pâturages sont entourés de fils de fer ou de barrières de bois pour enclore le bétail.

Quand nous arrivons à Trois-Rivières, il est midi passé. La population et le maire nous attendent à la gare et il faut tout d’abord se rendre à l’Hôtel de ville. Une heure de discours… L’accueil qui nous est fait est d’une cordialité tellement simple et franche que ce temps passe très vite.

Quand la réception est terminée, le maire s’excuse :

— Je ne pourrai pas vous accompagner à déjeuner ; je suis retenu chez moi, mais le promaire me remplacera et les échevins seront là.

— Vous dites ?

Il devine que plusieurs ne comprennent pas et explique que le « promaire, » c’est l’adjoint et que les « échevins » sont les conseillers municipaux.

Après déjeuner, visite rapide de la ville qui, de simple village agricole, est en train de devenir une ville industrielle florissante, rivale future de Québec et de Montréal. Déjà il y a dans le port d’importants chantiers où on construit en ce moment un « pétrolier » pour notre Compagnie transatlantique. Il est facile de prévoir que, dans l’avenir, de telles transformations seront nombreuses le long du Saint-Laurent, qui deviendra un des principaux centres de l’industrie et du commerce du monde. Remarquons en passant que la ville de Trois-Rivières se développe suivant un plan arrêté dans tous les détails.