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d’ailleurs dans la plus parfaite harmonie et en pleine indépendance respective.

Après avoir quitté l’archevêché, thé chez le lieutenant-gouverneur, dans une superbe résidence, entourée d’un grand parc, comme en ont partout, dans toutes les parties du monde, les gouverneurs anglais ; puis la liberté nous est rendue et nous pouvons parcourir à notre gré la ville de Québec. Ville entièrement française, non seulement de langue, mais d’aspect, avec de vieilles rues étroites, tortueuses, montantes, tandis qu’en bas s’étalent à l’aise les quartiers industriels et le port. Aux enseignes des boutiques un certain nombre de noms retiennent notre attention. Des libraires, des pharmaciens, des artisans s’appellent La Chance, La Flamme, La Jeunesse, La Flèche… Ce sont les descendants des anciens soldats devenus colons. Ce matin, on nous a présentés à une femme charmante, qui porte à ravir le nom délicieux de Jolicœur.

Quelle douce sensation que de retrouver ici, intacte, continue, la liaison avec l’ancienne France !

La superbe promenade de Frontenac domine la ville ; elle rappelle la terrasse de Saint-Germain, plus belle encore, car à ses pieds coule le majestueux Saint-Laurent. C’est là qu’est notre hôtel, avec des chambres bretonnes où l’on trouve sur de vieux bahuts des statues de saints aux couleurs passées et d’antiques madones, graves ou souriantes. Quand, chez nous, tout se sera uniformisé dans la note grise d’une banalité commune, on pourra encore revoir au Canada des coins de vieille France.

Après dîner, l’Université étant en vacances, conférence au grand Séminaire, l’ancien, avec ses vieux bâtiments, sa vieille cour, ses vieux tilleuls. Nous y retrouvons toute la haute société de Québec avec le cardinal, le lieutenant-gouverneur, le maire, etc. Mgr Landrieux soulève l’enthousiasme en parlant de Verdun.


* * *

Le lendemain nous allons en chemin de fer de Québec à Trois-Rivières. Remarqué au passage des stations qui s’appellent Belair, Bellefontaine, etc.

Pour la première fois, nous traversons de jour la campagne canadienne ; elle est belle, mais moins bien cultivée que chez