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est certainement une femme très supérieure. Quant au Prince, il fera un roi à la façon de Henri IV. » Après la visite au Palais Cavalli : « Rien ne peut égaler leur bonté envers nous. Pour la Princesse, j’en raffole. Elle est l’être le plus parfait. Elle est absolument laide avec un tel charme, une telle manière d’être, que je défie n’importe qui… de se souvenir de sa laideur. Quant au Prince, il est évident qu’il sera roi, mais pour combien de temps ?… Dans le salon de la comtesse de Chambord, que ce soit à Vienne, Frohsdorf ou Venise, vous êtes en France, et tout ce qui vous entoure est tellement imprégné du parfum de la patrie absente, qu’un soir, en entendant des barcajuoli chanter une sérénade sous les fenêtres du Palais Cavalli, je me suis retenue de dire à ma voisine : Que font-ils sur le boulevard ! Henri voudrait (et je l’y pousse) écrire une brochure politique sur Henri V[1]aussitôt son retour à Paris… afin que l’on sache que le dernier des Bourbons est l’idéal des rois constitutionnels et libéraux, et qu’il a beaucoup appris, et beaucoup oublié[2]. »


ALEXIS DE SAINT-PRIEST

Dans la correspondance d’Henri Blaze, je n’ai aucune lettre de lui écrite de son poste, Copenhague. Il faut en conclure que le jeune attaché était rarement en Danemark. Cependant, de Copenhague, Saint-Priest l’interroge ; il s’ennuie furieusement, Saint-Priest : « Voyez-vous souvent M. Decazes ? Etes-vous content de lui ? Il doit l’être de moi : au lieu de deux volumes qu’il n’aurait pas lus, j’ai fait avoir la croix de Commandeur à son fils. Que ne puis-je orner aussi vos jeunes épaules, ou du moins suspendre quelques amulettes à votre boutonnière ! Vous vous plaignez de l’exiguïté de mes missives ; ce reproche est obligeant ; mais que diantre voulez-vous que je vous mande de Copenhague ?… Quant à vous, mon cher collaborateur, ne vous dégoûtez pas de m’écrire de jolies lettres… Louis La Harpe et leur Grimm, ne vous valaient pas. Adieu, chevalier ! Adieu, commandeur ![3] »

Le mois précédent, Saint-Priest a lu les Burgraves : « Le

  1. Henri Blaze écrivit en effet cette brochure.
  2. Inédite.
  3. 26 mai 1843, inédite.