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n’est plus un danger. Les Allemands se raidissent ; ils n’ont rien perdu de leur orgueil : ils sont toujours convaincus qu’ils sont le premier peuple du monde. Et ils n’ont rien perdu non plus de leur propension au mensonge. L’Allemand est très dissimulé, j’en ai eu plus d’une fois la preuve. Il attend son heure ; il espère bien que ses dirigeants ne laisseront pas échapper le moment favorable. « Ayons confiance, disait naguère le général de Winterfeldt, nous retrouverons demain la situation que nous avions hier. » L’influence de ceux qui préparent une revanche grandit peu à peu. Le fameux pangermaniste Kurd von Strantz, dans une lettre enflammée que plusieurs journaux ont reproduite, n’a pas craint de pronostiquer une nouvelle guerre « à bref délai. »

Certains Allemands paraissent animés d’un désir, peut-être sincère, de justice et de vérité ; mais ce désir est comme submergé par une sorte de culte à l’égard du germanisme. Cet état d’esprit est le résultat du dressage auquel l’Allemagne a été soumise et de la transformation qui s’est faite sous la triple influence de l’école, de l’armée, de l’administration.

Si nous considérons ce que l’Allemagne a fait hier, nous devons nous demander ce qu’elle pourra faire demain. Il ne faut sans doute pas désespérer de l’avenir ; mais l’enquête à laquelle je me suis livré ne m’a pas permis de découvrir jusqu’à ce jour une Allemagne libérée de l’influence prussienne, une Allemagne avec laquelle nous puissions collaborer sans crainte pour les œuvres pacifiques qui sollicitent l’activité des hommes. Le premier devoir de la France est de garantir sa sécurité. Soyons très attentifs du côté de l’Est et préparons-nous à prendre, s’il le faut, de viriles résolutions.

Georges Blondel.