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dont les effets ont le plus souvent les caractères d’une intoxication, on a montré que la crise fébrile du paludisme a, au contraire, ceux des chocs anaphylactiques des injections albumineuses et est précédée comme eux par la crise hémoclasique. Il a été prouvé que l’accès de fièvre palustre est causé par les mérozoïtes (fragments corpusculaires de l’hématozoaire du paludisme) qui en éclatant, avant la crise, dans le sang y produisent l’effet d’une véritable injection colloïdale. Ainsi, grâce à la nouvelle méthode, on peut annoncer à l’avance les accès palustres.

Enfin il paraît maintenant démontré que le choc chirurgical, le choc traumatique, ce terrible phénomène qui a causé la mort de tant de nos blessés, est lui aussi un phénomène du même ordre, et qu’il provient du déversement dans le sang des albumines provenant des tissus écrasés ou blessés.

Dans tous ces faits, on a vu le choc survenir à la suite de l’introduction dans l’organisme de substances hétérogènes.

Il restait, pour achever le cycle des cas pathologiques manifestés par le choc hémoclasique, pour élargir encore le vaste domaine morbide qui relève de ce phénomène, à montrer l’existence de ce choc dans quelque maladie où aucune substance étrangère hétérogène introduite dans l’organisme n’intervient comme cause agissante.

Cette maladie, le professeur Widal l’a trouvée réalisée dans l’hémoglobinurie paroxystique « a frigore. » Comme son nom l’indique, cette maladie est caractérisée par ce fait que, sous l’influence du froid, — et simplement en mettant les mains dans l’eau froide par exemple, — le malade subit une altération de son sang qui se traduit par la présence, dans ses urines, d’hémoglobine qui est, comme on sait, la matière colorante des globules rouges.

Chose curieuse, pendant les crises de cette maladie on observe identiquement tous les signes cliniques et malaises qui caractérisent les attaques d’anaphylaxie ; pareillement l’analyse du sang montre que celui-ci subit, avec toutes ses modalités, la crise hémoclasique caractéristique. En un mot, cette maladie réalise exactement, dans certains cas, le tableau des symptômes qui caractérisent les chocs anaphylactiques. Ceci tend à prouver, mieux encore que tous les raisonnements que nous avons faits, que les substances hétérogènes qui causent ces chocs n’agissent pas chimiquement sur l’organisme, mais au contraire physiquement, en rompant, en disloquant, par un mécanisme encore mal élucidé, l’équilibre, l’arrangement des groupements moléculaires qui constituent nos humeurs et