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M. Loucheur faisait état devant la Chambre, dans la séance du 8 février dernier ; et il est très invraisemblable que les prévisions de M. Loucheur, déjà fort optimistes, puissent être dépassées.

Comme contre-partie de ces concessions nouvelles, il eût été naturel que les Alliés prissent, au moins, sans plus tarder, des gages matériels. C’était, en France, le vœu certain des Chambres et du pays ; et, lorsque M. Briand a fait rappeler une classe, tout le monde a vu dans son geste le signe d’une inévitable et prochaine action de justice. Mais, au moment où nous nous apprêtions à nous assurer enfin une garantie positive, nos amis nous ont retenus. Il leur a paru suffisant que l’Allemagne changeât de ministres et qu’elle levât les mains en l’air, comme autrefois ses soldats, lorsqu’ils attiraient les nôtres dans un guet-apens. Devant cette soumission provisoire, devant la signature d’une déclaration qui a une forme irréprochable, mais que la Deutsche Zeitung qualifie déjà elle-même effrontément de nouveau chiffon de papier, le Conseil suprême s’est senti rassuré ; il a enjoint à nos gendarmes et à nos huissiers de laisser le débiteur en paix et de retourner chez eux. Bien. Mais contre ce qu’on nous a demandé, que nous a-t-on donné ? Nous ne le saurons pas avant quelque temps. Pour le moment, reportons-nous à la déclaration commune du 5 mai. Il y est dit que les Alliés décident « de procéder, le 12 mai, à l’occupation de la Ruhr et de prendre toutes autres mesures militaires et navales, faute par le gouvernement allemand d’avoir rempli les conditions ci-dessus. » — « Mais, disent déjà les Allemands, le 12 mai est passé ; nous nous sommes inclinés, et nous avons, par suite, définitivement échappé à l’occupation de la Ruhr. Du reste, la déclaration du 5 mai portait, ajoutent-ils, que l’occupation de la Ruhr cesserait lorsque nous aurions exécuté les conditions énumérées au paragraphe C. Or, quelles étaient ces conditions ? C’était « de déclarer catégoriquement, dans un délai de six jours après la conversation des Alliés, notre résolution d’exécuter sans réserve nos obligations. Cette résolution, nous l’avons déclarée. Que peut-on nous demander de plus aujourd’hui ? Il n’est écrit nulle part que, si, à un moment quelconque, nous manquons, sans le vouloir, à une de nos obligations, la Ruhr sera occupée. » Et il est vrai que le texte de la déclaration commune est fort obscur. On affirme « de source autorisée » que, le 4 mai, à la fin de la séance du Conseil suprême, M. Lloyd George a répondu à une question de M. Briand : « Si un manquement survient dans l’avenir, au cours du programme imposé au gouvernement de Berlin, la sanction de la Ruhr sera