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et depuis l’armistice, les valeurs étrangères ont été, dans toutes les Bourses allemandes, l’objet d’importantes transactions. Le gouvernement du Reich a, à cet égard, des informations précises, puisque, dès le 23 août 1916, une ordonnance a prescrit à toute personne habitant l’Allemagne de déclarer les valeurs étrangères qu’elle avait en sa possession et les valeurs allemandes qu’elle avait déposées à l’étranger. De même, une ordonnance du 22 mars 1917 a autorisé le chancelier de l’Empire à exiger le prêt des valeurs étrangères qui seraient désignées par les pouvoirs publics et, en fait, toute une série de valeurs suédoises, danoises et suisses, puis, plus tard, d’obligations américaines, ont été expropriées. Le Président de la conférence de Bruxelles a transmis au Reich, en janvier dernier, un questionnaire relatif aux conséquences de cette réglementation et à l’état actuel des avoirs étrangers de l’Allemagne. Suivant sa coutume, le gouvernement allemand n’a pas fourni les informations qui lui étaient demandées, mais la Commission des Réparations a actuellement entre les mains la preuve que les nationaux allemands ont conservé une grande partie des valeurs étrangères qu’ils possédaient avant la guerre et que même bon nombre d’entre eux se sont constitué, au dehors, depuis la paix, des avoirs nouveaux, provenant de sources diverses. Les hommes d’affaires allemands ont repris, avec une activité nouvelle, la tradition de l’impérialisme économique et ils ont recommencé à s’engager dans de grandes entreprises étrangères. On sait comment le groupe Stinnes a pénétré en Italie et en Autriche ; on se rappelle, en particulier, l’affaire de l’Alpine Montangesellschaft. Mais l’Institut Solvay, de Bruxelles, a déjà signalé à la Commission des Réparations une cause beaucoup plus curieuse de formation d’avoirs allemands à l’étranger. C’est l’évasion fiscale. La fraude a pris, en Allemagne, des proportions invraisemblables. Les contribuables du Reich s’arrangent, de plus en plus, pour ne pas payer leurs impôts. Ils exportent des billets de banque allemands ou des valeurs industrielles allemandes, et ils cherchent à s’en débarrasser à l’étranger contre des sommes qu’ils déposent dans des banques ou avec lesquelles ils achètent des valeurs. De même, beaucoup d’industriels ou de commerçants, faisant des opérations extérieures, laissent intentionnellement le gros de leurs bénéfices hors du Reich. Pour arriver, sans doute, au même but, de grands établissements se créent des filiales dans divers pays : témoin la maison Mendelsohn et la Deutsche Bank elle-même, qui se sont donné récemment des filiales hollandaises. Aussi bien, dans son numéro du 2 avril dernier, la Gazette de Francfort constatait-elle que,