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L’ŒUVRE DE LA FRANCE EN SYRIE.

À l’Est, c’était la menace de groupements rebelles contre lesquels il fut fait appel à la fidélité de tribus amies, répondant au titre général d’Anezeh, et dont le grand chef, Moudjem Bey, avait témoigné depuis longtemps sa fidélité à la France. Aidé par une mission française, il entreprit la pacification de tout le territoire bédouin, parcouru par les tribus nomades, qui s’étend entre Alep et la région de l’Euphrate. Après une période de préparation méthodiquement assurée à Alep, il s’est mis en route vers l’Euphrate qu’il a descendu jusqu’à Deïr El Zor, où il s’est installé le 13 octobre. L’accueil fait au grand chef Bédouin a été enthousiaste, car, après tous les désordres que le pays venait de subir, les populations étaient heureuses de voir la garantie française donnée à leur sécurité. En l’honneur de l’arrivée de Moudjem Bey, les autorités locales organisèrent une réception « à l’européenne » au cours de laquelle la musique municipale joua de toute la force de ses cuivres un air célèbre, mais inattendu sur l’Euphrate : « Viens, Poupoule. »

Enfin, le massif montagneux des Ansarieh, qui s’étend le long de la côte, à l’Est de Lataquieh, l’ancienne Laodicée, demeure encore le repaire de bandes poursuivies par nos colonnes.

L’accomplissement de ces tâches complémentaires devait assurer à notre organisation une base suffisante pour étendre progressivement l’ordre à l’ensemble du pays. Mais, avant même le développement de ces succès, notre désir de faire évoluer le pays vers une forme politique et administrative conforme à nos aspirations s’était déjà affirmé.

viii. — LES NOUVEAUX ÉTATS DE LA SYRIE

C’est au Liban que nous comptions, en Syrie, nos plus vieux et nos plus solides amis. C’est donc en ce pays que le général Gouraud, agissant au nom de la Puissance mandataire, voulut créer le premier État de la Syrie nouvelle. C’était donner satisfaction à un désir traditionnel et sacré, animant depuis tant d’années les populations libanaises si jalouses de leur indépendance pour laquelle elles avaient déjà beaucoup souffert. Pour comprendre toute la force de leurs espoirs, que l’on se reporte au fait si touchant qui a été maintes fois rapporté. Le grand patriote libanais, Joseph Caram, qui avait consacré toute sa vie