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dont Napoléon disait qu’elles sont un « important sujet d’études. »

Après diverses vicissitudes et faux départs, l’École des Chartes fut instituée définitivement par ordonnance royale du 22 février 1821. Le comte Siméon, ministre du roi Louis XVIII, disait, dans le rapport précédant le projet d’ordonnance : « L’homme instruit dans la science de nos chartes et de nos manuscrits est, sans doute, bien inférieur à l’historien ; mais il marche à ses côtés, il lui sert d’intermédiaire avec les temps anciens et il met à sa disposition les matériaux qui ont échappé à la ruine des siècles. Que ces utiles matériaux manquent à l’homme appelé par son génie à écrire l’histoire, une partie de sa vie se consumera dans des études toujours pénibles et souvent stériles… Autrefois la studieuse congrégation de Saint-Maur s’était livrée avec succès à ce genre de science. Aujourd’hui, par l’effet du changement qui s’est produit dans nos lois politiques et dans nos lois civiles, ces mêmes études, que ne soutiennent plus ni la tradition, ni aucun enseignement public, et auxquelles les individus n’ont aucun intérêt à se livrer, s’éteignent complètement[1]… »

En fondant ainsi le « séminaire » où la science des antiquités nationales devait refleurir, la Restauration allait au-devant d’un mouvement de l’opinion publique. Précisément en ces fécondes années 1819-1821, le romantisme éclatait, si j’ose dire, par la publication des Poésies d’André Chénier, des Méditations de Lamartine et des premiers poèmes de Victor Hugo. Dès lors, le Moyen-Age hantait les esprits. Victor Hugo donnait Odes et Ballades et il préparait Notre-Dame de Paris. On était las « des Grecs et des Romains. » Les Brutus et les Anacharsis avaient abusé. Comme il arrive quand une génération violemment dominatrice a succombé, les successeurs se séparaient violemment de ces ancêtres emphatiques et péremptoires. Prétendant découvrir à leur tour la vérité et la simplicité, ils recherchaient, à la suite de Walter Scott, l’émotion pittoresque dans la contemplation des siècles du Moyen-Age arrangés selon le caprice et la fantaisie de la mode nouvelle.

L’École des Chartes fut donc portée à ses débuts par le

  1. Ces renseignements sont extraits d’une Histoire de l’École des Chartes par M. Maurice Prou, qui va paraître incessamment et dont l’auteur a eu l’extrême obligeance de me communiquer les épreuves.