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le fleuve, aux machinations du germanisme de Berlin, les attraits les plus actuels du génie de la France.


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Quelles satisfactions nouvelles la France peut-elle apporter à la Rhénanie ? Notre tâche (j’entends vos questions), sera-t-elle d’ordre pratique ou sentimental ? Sera-t-elle idéaliste d’abord, ou réaliste avant tout ? L’alternative n’existe pas pour nous aujourd’hui, pas plus qu’elle n’a existé pour nos pères, au temps de la Révolution et de l’Empire. Nous avons sans doute à nous préoccuper de faire une bonne politique économique et d’assurer aux Rhénans des avantages sociaux et administratifs, mais avant tout le rôle de la France a toutes les époques, c’est d’accomplir une œuvre éducatrice. Elle est la nation qui, dans ses meilleurs moments, croit n’avoir rien fait si elle n’éclaire et ne satisfait les aspirations de ceux avec qui elle prend contact… C’est dans cet esprit qu’au cours de ces leçons, nous nous sommes efforcé de dégager quelques éléments indispensables pour nous orienter sur le terrain rhénan et établir les directions que l’heure réclame.

Nous savons ce que sont les Rhénans. Ils ont peur du désordre, et ils semblent toujours, selon le mot de Gœthe, détester plus le désordre que l’injustice. Ils sympathisent surtout avec les volontés qui semblent garantir la vie matérielle, la satisfaction et même le plaisir des masses dans un certain enrégimentement, sans cette prime que nos procédés d’éducation et de politique promettent toujours à l’individu autonome.

Il n’y a pas de pays, même en Flandre ou en Suisse, où on soit plus amateur des réjouissances en commun, des cavalcades, des cortèges, des kermesses, des plantureuses ripailles de la brasserie que dans les villes rhénanes. Même à un plan supérieur, dans le domaine des beaux-arts, les festivals de musique, les représentations des troupes d’amateurs sont des caractéristiques de la population. Elle déteste l’isolement, fût-ce celui du foyer, et tient à se mettre au contact de la collectivité, dès que sont enjeu les joies ou les activités de l’individu. Nous n’y réussirons pas, si nous restons des gens sans rayonnement avec notre petit quant à soi.

Cet esprit d’association animant les activités laborieuses et persistant même dans le plaisir, c’est une particularité que