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fortune politique de sir Reginald Tower. Peut-on du moins espérer qu’elle met fin à la dangereuse politique que le Gouvernement anglais, dont sir Reginald a été l’interprète peut-être maladroit, mais fidèle, a suivie jusqu’ici dans la Baltique ?

L’amirauté britannique a traditionnellement une politique de la Baltique, au nom de laquelle elle a jadis bombardé Copenhague, et qu’elle impose à la diplomatie. La mer est « territoire britannique, » et c’est du pont d’un bateau que le pilote regarde les pays riverains. On entre dans la Baltique par les détroits danois ; le Danemark doit donc rester faible, et les Anglais ont mis peu d’empressement à assurer l’indépendance des plébiscites du Slesvig. On y entre aussi par le canal de Kiel ; or le traité dispose que « le canal de Kiel et ses accès seront toujours libres et ouverts sur un pied de parfaite égalité aux navires de guerre et de commerce de toutes les nations en paix avec l’Allemagne. » (Art. 380.) Et d’ailleurs, les fortifications d’Helgoland sont détruites ; et l’article 195 stipule qu’« afin d’assurer l’entière liberté d’accès de la Baltique à toutes les nations, » l’Allemagne ne devra élever aucune fortification ni établir aucune batterie commandant les routes maritimes entre la Mer du Nord et la Baltique. Voilà pour la porte d’entrée.

Dans la péninsule Scandinave, l’Angleterre a depuis longtemps une situation prépondérante en Norvège ; elle travaille à accroître son influence, en Suède ; sa propagande, parallèle à celle des Allemands, parait surtout se proposer d’ébranler le prestige moral que la guerre et la victoire ont acquis à la France. Des étudiants suédois sont appelés en Angleterre. Des combinaisons d’affaires anglo-germaniques travaillent à éliminer les autres concurrents ; l’Angleterre cherche à s’assurer la suprématie économique.

Sur les rives de la Méditerranée du Nord, la politique de l’Angleterre est de ne laisser grandir aucune Puissance militaire ; plus nombreuses et plus faibles seront les petites nations indépendantes qui y trouvent leur débouché maritime, plus assurée et plus durable sera la mainmise du commerce britannique sur toute leur vie économique. Donc, pas de Pologne forte ayant issue sur la mer ; l’Angleterre y pourvoit en organisant Dantzig, non pas pour la libération de la Pologne, mais pour son asservissement. La Lithuanie ne devra pas s’unir à la