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Lui-même, frère de Lui, Nous, notaire. Tien, domestique de Lui-même. Elle, Un. Elle, Deux, etc..

En août 1859, George Sand remit à F. Buloz le manuscrit de Jean de la Roche. Le directeur de la Revue en fut satisfait ; toutefois, il demanda quelques corrections, ici ou là : il trouva certaines parties trop romanesques, et puis l’héroïne, qui n’a que quinze ans, raisonne comme si elle en avait vingt-cinq ou trente. George ne pourrait-elle la vieillir un peu ?

Cependant l’intérêt de Jean de la Roche ne réside pas uniquement dans le roman, mais aussi dans la préface… Car George s’aperçut à la longue que Paul de Musset avait écrit Lui et Elle, et répondit, par cette préface, assez fièrement, aux attaques de Paul :

« Quant aux malheureux esprits qui viennent d’essayer un genre nouveau dans la littérature et dans la critique, en publiant un pamphlet, en annonçant à grand renfort de réclame et de déclamations imprimées, que l’horrible héroïne de leur élucubration était une personne vivante, dont il leur était permis d’écrire le nom en toutes lettres, et qui lui ont prêté leur style en affirmant qu’ils tenaient leurs preuves et leurs détails de la main d’un mourant, le public a déjà prononcé que c’était là une tentative monstrueuse, dont l’on rougit, et que la vraie critique renie, en même temps que c’était une souillure jetée sur une tombe.

« Et nous disons, nous, que le mort illustre renfermé dans cette tombe, se relèvera, indigné, quand le moment sera venu. Il revendiquera sa véritable pensée, ses propres sentiments, le droit de faire lui-même la fière confession de ses souffrances, et de jeter encore une fois vers le ciel, le grand cri de justice et de vérité qui résume la meilleure partie de son âme et la plus vivante phase de sa vie…

« Quelques amis ont reproché à l’objet de ces outrages de les recevoir avec indifférence ; d’autres lui conseillaient, il est vrai, de ne pas s’en occuper du tout ; après réflexion, il a jugé devoir s’en occuper en temps et lieu, mais il n’était guère pressé. Il était en Auvergne, il y suivait les traces imaginaires de son roman nouveau, à travers les sentiers embaumés, au milieu des plus belles scènes du printemps. Il avait bien emporté le pamphlet pour le lire, mais il ne le lut pas. Il avait oublié son herbier, et les pages du livre furent purifiées par le contact des