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populations, des territoires qui leur appartiennent. Voyez cependant, à l’horizon, toute cette bande de terre que baigne le Jourdain. Elle est maintenant incorporée à l’État de Sion.

Nous sommes-nous, du moins, concertés également avec l’Angleterre pour régler les questions qui se posent au Nord de la Syrie et pour mieux définir nos rapports avec les Grecs et avec les Turcs ? Il ne semble guère. Le Gouvernement français avait manifesté publiquement l’intention de réviser le traité de Sèvres, qui n’est pas ratifié par les Chambres et qui ne le sera sans doute pas facilement. Le Gouvernement anglais a non moins publiquement annoncé que rien ne faisait prévoir cette révision. Ces contradictions ne nous mettent pas, vis à vis du Gouvernement ottoman, dans une posture très favorable. Nous sommes, à l’égard de la Grèce, dans une position encore plus embarrassante. Il nous arrive parfois, dans la vie, d’avoir un vieil ami qui se conduit très mal envers nous. Comme nous le tutoyons depuis l’enfance, nous ne voulons pas nous donner le ridicule de nous battre en duel avec lui. Nous croyons nous venger suffisamment en prenant le parti de ne le plus saluer. Mais, à partir du jour où nous nous sommes arrêtés à cette belle résolution, c’est comme un fait exprès : nous rencontrons partout notre vieil ami, et lui, qui ne nous en veut pas du tout pour le mal qu’il nous a causé, il redouble de politesse envers nous et met chapeau bas à notre passage. Que voulez-vous alors que nous fassions ? Nous commençons par détourner la tête, une fois, deux fois; mais il insiste et, de guerre lasse, un beau jour, nous lui rendons son salut. Je ne jurerais pas qu’avec la Grèce les choses se passeront autrement. Au lieu de nous mettre en garde contre les suites de son apostasie, nous avons frappé son roi d’une excommunication mineure. Nous n’avons même pas rappelé nos ministres, nous les avons consignés dans leurs légations. Le Roi a débarqué au Pirée, acclamé par la foule enthousiaste, et il est rentré dans ce Palais d’où il avait envoyé à Guillaume II de si chaleureux télégrammes. A peine avait-il mis le pied sur les marches de son trône qu’il a donné aux Alliés l’assurance solennelle de sa fidélité. Les Alliés faisant mine de ne pas entendre, il a recommencé. Il va se trouver tous les jours sur notre chemin pour nous donner un coup de chapeau. Un beau matin, nous aurons un mouvement réflexe et nous oublierons de rester couverts. Tâchons, du moins, ce jour-là, d’avoir avec le roi Constantin une explication catégorique, et, si nous retirons notre anathème, prenons pour l’avenir des garanties efficaces. Il en est une qu’il ne serait, sans doute, pas impossible de nous faire attribuer. Dans le traité