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mitrailleuses, et de faciliter le passage aux troupes alliées. Plus on regarde à ces incidents et plus il apparaît qu’ils étaient tombés dans le domaine public, en suggérant à la presse des commentaires sans qu’on sût exactement à quel point il fallait y croire. Du reste, une certaine lassitude se manifestait dans le bas personnel des réservistes. Ils alléguaient qu’on les avait retenus quand ils voulaient agir et qu’ils ne marcheraient plus que sur l’ordre du Roi.

Parmi les officiers, au contraire, la résistance contre les concessions que pourrait faire celui-ci devenait plus active. On disait que les princes André et Alexandre étaient à la tête du mouvement. En réalité, toutes les résistances étaient attisées par la haine qu’inspirait Vénizélos dans les milieux gounaristes et à la Cour ainsi que dans les États-majors. C’était un foyer qui couvait sous la cendre et qui menaçait de se rallumer, dès que les circonstances lui en fourniraient l’occasion.

A partir du mois de novembre, et tandis que se multipliaient les difficultés entre la diplomatie de l’Entente et le ministère hellénique, difficultés que l’intervention de l’amiral Dartige ne parvenait pas à résoudre, les rapports envoyés à Paris par le service des renseignements se ressentaient des angoisses qui étreignaient les esprits à l’approche de cette journée du 1er décembre, où devait se faire sentir l’action de l’Entente, pour obtenir les satisfactions auxquelles elle avait droit. L’attaché naval de France avait été mandé à Paris par le ministre de la Marine ; le lieutenant de vaisseau Laborde le remplaçait en attendant son retour. Mais cette circonstance n’atténuait en rien l’autorité des rapports envoyés au gouvernement français.

Le 17 novembre, une manifestation vénizéliste s’étant produite dans la rue, le procureur du Roi et l’un de ses assesseurs intervinrent pour la disperser. Mais un lieutenant de vaisseau français, du contrôle officiel de la police, qui se trouvait là, se fondant sur le fait que la direction du service d’ordre par la magistrature était illégale, ordonna aux agents grecs de laisser circuler les manifestants. Ceux-ci se dirigèrent alors vers la Légation de France. Arrivés entre cette Légation et le ministère de la Guerre, ils furent arrêtés par un barrage de soldats et chargés baïonnette au canon. Une rixe éclata, il y eut des coups de revolver. L’officier grec qui commandait le barrage tira en l’air et un de ses subordonnés tira un coup de fusil. Une