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A la faveur de ces incidents, quelques Allemands, dont les ministres alliés avaient obtenu l’expulsion, différaient leur départ sous divers prétextes, « Le gouvernement grec se moque absolument de nous, » écrivait l’attaché naval.

Ce mot reviendra souvent dans la bouche des agents de la France bien placés pour ne rien perdre de la comédie qui se joue sous leurs yeux : le commandant Ricaud qui dirige le service des renseignements sous la haute autorité de l’attaché naval auquel il rend compte chaque soir du résultat de ses enquêtes, le commandant Clergeau préposé au contrôle télégraphique et postal, le lieutenant de vaisseau Laborde qui remplace l’attaché naval quand’ celui-ci s’absente, et qui sert d’intermédiaire entre la légation et le commandant en chef de l’escadre alliée, M. Fougères, directeur de l’Ecole française ; groupe patriote qui donne aux subordonnés l’exemple du plus grand dévouement à la cause qu’il sert.

Il semble bien en effet que le gouvernement grec se moquait d’eux. Non seulement les expulsés ne partaient pas, mais plusieurs d’entre eux avaient été rayés de la liste d’expulsion dressée par nous. Le cas était le même pour les Grecs à expulser, pour les hommes d’Etat du parti gounariste : Streit, Stratos, Esslin, pour quelques journalistes qui jouaient un rôle considérable sans être revêtus d’aucun titre officiel. Ils étaient les inspirateurs de la politique qui nous était hostile. Une épuration était nécessaire, devant laquelle les Alliés reculaient.

« Voulez-vous m’autoriser à la faire par nos propres moyens sans intervention officielle ?… demandait l’attaché naval. Si l’on veut mettre hors d’état de nuire les agents de corruption et d’espionnage qui sont sur la note remise à la Grèce, il faut en prendre les moyens maintenant. »

A plusieurs reprises, il se plaint de la défiance dont ses informateurs sont l’objet à Paris ; elle a pour résultat de maintenir le gouvernement français dans une ignorance complète de l’état des esprits à Athènes et constitue de ce chef un péril national.

« M. Guillemin, écrit-il, estime que son devoir est d’aller à Paris pour exposer la situation qu’on ne comprend pas ou qu’on ne veut pas voir. Je vous assure que son voyage est nécessaire pour sauver la cause française presque désespérée aujourd’hui. Il a demandé avant-hier l’autorisation de partir ; on la lui a