Page:Revue des Deux Mondes - 1921 - tome 6.djvu/930

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


LA SITUATION A LA VEILLE DE LA CONFÉRENCE

A la veille de la Conférence, le grand hall du New-Willard n’est que bourdonnement de conversations, agitation, foule et bruit. La pea-cuck alley, l’allée du paon (ou de la vanité), sur laquelle ouvrent tous les salons, toutes les salles à manger d’en bas, — une institution de Washington, — et qui traverse l’hôtel de rue à rue, est plus animée ce soir qu’aux heures élégantes de musique et de thé. C’est à l’ordinaire l’un des lieux de rendez-vous élégants. On vient là, on se retrouve, on s’isole. Dans les fauteuils larges, profonds, une partie de la ville regarde l’autre passer. Ce soir, notre Premier, nos uniformes, nos délégués, semblent avoir attiré toute la ville d’un coup.

Au septième étage, dans son salon en rotonde, petit, d’un luxe sobre, confortable, les murs ornés de quatre belles reproductions d’aquarelles, pendant que les garçons préparent le thé, M. Briand reçoit la délégation. Comme toujours, notre Premier est d’excellente humeur. Il a été reçu cet après-midi par M. Harding. Il s’est entretenu avec M. Hughes. Il a le meilleur espoir en la Conférence, toute confiance en ceux qui la dirigeront.

Est-ce la conséquence de nouvelles et précieuses informations sur l’état actuel des esprits ici? Il n’est plus question aujourd’hui d’aucune demande de notre part à l’Amérique. M. Briand parait surtout désirer qu’il soit bien entendu que nous ne parlerons pas de nos dettes, que nous n’avons jamais eu désir, intention d’en parler. Si la question doit être soulevée, qu’elle le soit par d’autres. Il faut que notre position soit tout e de courtoisie, de désintéressement et d’attente.

On fait des hypothèses sur ce qui se passera après-demain. On est généralement d’avis que le discours de M. Hugues sera ferme, mais sans précision troublante, — en somme et comme au début de toutes les conférences, un intérêt de spectacle et c’est tout. M. Briand pourtant pense que cette première séance sera consacrée à tracer les grandes lignes et l’orientation de la Conférence. Il ne serait pas surpris que M. Hugues voulût, dès le début, des précisions. Il croit que notre rôle de témoin amical s’y affirmera. Lorsque se posera la question de la réduction des armements, nous devrons seulement faire valoir