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l’autonomie serbe ; puis, Nisch, la cité chrétienne du grand roi Stéphan Némania qui, au XIIe siècle, libéra la Serbie de la domination byzantine ; puis Kroujévatz, la capitale du tsar martyr Lazare Brankowitch, décapité en 1389 sur le champ de bataille de Kossowo, sous les yeux du sultan Mourad agonisant ; puis Kraliéwo, où l’Église autocéphale de Serbie fut fondée au XIIIe siècle par saint Sava ; puis Rachka, le premier berceau du peuple serbe et l’antique fief des Némania ; puis Uskub, où l’illustre Douchan se fit sacrer en 1346 « Tsar et Autocrate des Serbes, des Grecs, des Albanais et des Bulgares ; » puis Ipek, dont le patriarcat fut, pendant la longue nuit de la sujétion turque, le refuge de la conscience nationale ; bref, tous les sanctuaires du patriotisme serbe. Spalaïkowitch ajoute :

— Représentez-vous ce qu’a dû être cette retraite, sans parler des milliers de fugitifs qui suivaient notre armée. Représentez-vous…

Et, d’une voix que l’émotion précipite, il me décrit le vieux roi Pierre, moribond, ne voulant à aucun prix abandonner ses troupes et voyageant sur un caisson d’artillerie traîné par des bœufs ; le vieux voïvode Poutnik, aussi malade que son roi et chargé sur une civière ; enfin, un long cortège de moines, portant sur leurs épaules les reliques des églises, marchant jour et nuit dans la neige, un cierge à la main et psalmodiant leurs prières.

— Mais, dis-je, c’est une épopée, c’est une chanson de geste, que vous me racontez là !…


Mardi, 4 janvier.

La fête des Chevaliers de Saint-Georges a offert à l’Empereur l’occasion d’affirmer une fois de plus sa volonté de poursuivre la guerre ; il a adressé à son armée une proclamation qui se termine ainsi :

Soyez fermement assurés que, ainsi que je l’ai dit au début de la guerre, je ne conclurai pas la paix tant que nous n’aurons pas chassé le dernier ennemi de notre territoire. Je ne conclurai cette paix qu’en plein accord avec nos Alliés, auxquels nous sommes liés, non par des traités de papier, mais par une véritable amitié et par le sang… Que Dieu vous garde !

C’est la meilleure réponse aux avances qui sont naguère