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ajoutent que par impérialisme, nous avons non seulement brisé l’instrument le plus commode de notre politique, mais encore manqué à ce que nous devions à des alliés dans la Grande Guerre. Il n’est pas de sujet peut-être sur lequel on ait attaqué avec plus de légèreté et d’ignorance des faits la politique du général Gouraud.

C’est l’attitude de l’émir Fayçal qui a rendu impossible toute collaboration entre lui et la Puissance qui allait assumer le mandat sur la Syrie. A vrai dire, il se trouva immédiatement à Damas à notre égard dans une équivoque que ses conseillers britanniques ne firent rien pour dissiper. Il y représentait son père; celui-ci avait signé avec des agents anglais, à la fin de 1915, un traité qui devait lui faire engager avec les Turcs une lutte dont l’enjeu serait une couronne dont certains fleurons devaient être les villes de la Syrie intérieure, tandis qu’il acceptait que Bagdad n’en dépendit point. Alors qu’elle ne connaissait que très vaguement cette tractation, à laquelle elle n’avait pas participé, la France signa en mai 1916 avec l’Angleterre et la Russie une convention aux termes de laquelle sa situation était reconnue, même dans la Syrie intérieure où elle se réservait le droit de fournir des conseillers aux Gouvernements arabes qui pourraient s’y constituer.

Il n’y avait pour la politique anglaise qu’une manière de concilier les engagements qu’elle avait pris et qui chevauchaient si fâcheusement les uns sur les autres, c’était d’intimer à Fayçal l’ordre qu’à Damas il ne devait plus recourir qu’à l’aide et aux conseils de la France. Mais rien ne fut fait dans ce sens. L’Émir fut non seulement libre de gouverner à Damas, sous l’occupation britannique, comme si la France n’existait pas, mais encore de donner pour objet principal à sa politique la ruine systématique du vieux prestige français en Syrie. Nos partisans furent méthodiquement molestés pour bien montrer que nous étions incapables de les défendre. Une presse qui ne vivait que des subsides de l’Émir s’acharnait à nous vilipender, ne reculant pas devant les plus grosses calomnies qui faisaient un crédit illimité à la crédulité du public, et la police ajoutait sa force aux excitations de cette presse pour obtenir des manifestations contre nous et faire ainsi croire au monde que la Syrie était particulièrement opposée au mandat français. Après l’occupation de la zone littorale par nos troupes, ce fut