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tant quelques raisons de supposer que c’étaient là des terres appartenant également, sinon au père de François, du moins à ses proches parents. En effet : 1o Grandgousier cite ces deux terres, avec La Devinière et Chavigny, parmi ses places ; 2o Grandgousier les distribue en récompense à ses compagnons[1] ; 3o Panurge réunit Gravot, Chavigny, La Pomardière et La Devinière dans son discours lanlernois. On sait d’ailleurs qu’une parente de Rabelais habitait la paroisse de Benais, touchant Gravot, et on montre à Gravot, sur la lisière d’un bois, la maison où l’auteur de Pantagruel aurait séjourné. Les Quinquennais sont cités au livre IV. — Gravot est un hameau de quelques maisons.

D’autre part, après sa victoire sur Picrochole, Grandgousier récompense ses fidèles serviteurs en leur attribuant ses « châteaux et terres voisines. »[2]. Eh bien ! ces « châteaux » de Grandgousier, ce sont précisément des propriétés d’Antoine Rabelais ou de ses proches, comme Varennes, Ligré, où nous savons que la belle-mère d’Antoine Rabelais avait des rentes ; quant à ces « terres voisines, » Rabelais nous les a citées au chapitre xlvii comme étant celles des confédérés de Grandgousier, et nous montrerons tout à l’heure que ce sont très vraisemblablement des communes qui s’allièrent au père de l’auteur pour soutenir contre Gaucher de Sainte-Marthe, alias Picrochole, le grand procès qui donna à maître François l’idée de la guerre picrocholine.

On aura d’ailleurs observé que Grandgousier ne fait point don à ses serviteurs de La Pomardière, ni de Chavigny, ni de La Devinière. Pourquoi ? Parce que ce sont là ses meilleures places, — en même temps que les principaux domaines d’Antoine Rabelais. Et quoique maître François ne dise nulle part comment se nomme le « château » où réside le père de Gargantua durant tout le premier livre, il est certain que cette capitale de Grandgousier c’est le domaine patrimonial des Rabelais : La Devinière. L’examen de la guerre picrocholine le prouvera tout à l’heure ; en attendant, divers rapprochements l’établissent.

Je m’excuse de ces remarques un peu arides : elles sont nécessaires. Ouvrons Gargantua au ch. xxxvii. Nous y verrons comment Gargantua avale par mégarde des pèlerins qui s’étaient

  1. I, ch. li.
  2. Ibid.