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d’argumentation dogmatique, mais en attitude et en procédés, — l’accent juste et rassurant sur les approches du catholicisme, si redoutées dans les Balkans jusqu’alors. Habiles, ils finiront par créer autour d’eux une atmosphère de confiance ; utiles, par se constituer une clientèle. Ce sont déjà de grands résultats pour une Puissance spirituelle accoutumée à ne pas compter avec le temps, et à laquelle la patience n’a jamais manqué.

En définitive, de la veille au lendemain de la guerre, les différences qui marquent l’état de la question des deux Rites peuvent se ramener à quelques traits originaux et saillants.

Autrefois, tous les ressorts de la politique, intérêts dynastiques, intérêts nationaux, traditions de la diplomatie, semblaient raidis contre l’éventualité d’un rapprochement : les voici qui se détendent, et, si la politique reste en jeu, nous dirons tout à l’heure dans quelle mesure, c’est plutôt à l’avantage des desseins et des espoirs romains.

Autrefois, la théologie seule, ou presque seule, paraissait l’arbitre du problème, ce qui n’était peut-être point pour en rendre la solution plus aisée : aujourd’hui, on dirait qu’elle a rétrogradé au second ou même au troisième plan, et, quand elle reviendra au premier, — car après tout, le mot de la fin n’appartient qu’à elle, — les choses seront probablement assez avancées, du côté de l’opinion et des gouvernements, pour inspirer aux controversistes le désir d’un accord.

Autrefois, les Papes faisaient des avances à l’Eglise grecque, plus particulièrement au Patriarchat de Constantinople, en considération de son ancienneté, de son prestige et de son indépendance relative vis-à-vis des Puissances temporelles. Mais l’Eglise nationale grecque se laisse ballotter aujourd’hui au gré des courants vénizélistes ou anti-vénizélistes ; elle est d’ailleurs en délicatesse avec le Phanar, qui lui-même a beaucoup perdu de son influence. A présent donc, nul ne peut s’y tromper, c’est du côté du monde religieux slave et surtout de la Russie que le Saint-Siège s’oriente.

Autrefois enfin l’ambition, pour ainsi dire sacrée, que nourrissent les Pontifes romains, de ramener à la communion catholique tout le christianisme dissident, semblait tenir la balance égale entre l’hérésie protestante et le schisme gréco-slave, et sans doute avaient-ils à se féliciter d’un plus grand nombre de conversions individuelles du côté de celle-là que de celui-ci. Le