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NOS ENQUÊTES

BOLCHÉVISTES DE HONGRIE

I
AVANT LA RÉVOLUTION


I. — LE PORTRAIT DE BISMARCK

Un jour d’automne de l’année 1899, un jeune Français débarquait à Budapest. Personne ne l’attendait à la gare, et il se trouvait bien embarrassé pour retirer son bagage et se faire conduire à la maison où il devait se rendre, car naturellement il ne savait pas un traître mot de hongrois.

Ce sont des minutes pénibles, ces arrivées dans un pays inconnu, où l’on n’est pas amené par le seul attrait du voyage, mais poussé par les circonstances, avec la perspective de longs mois à passer au milieu de choses et de gens, que le hasard a choisis pour vous. Mon arrivée en Hongrie, par cet après-midi d’automne, c’était le couronnement d’une longue suite d’années de collège, de jours sans lumière, sans liberté, sans nature, d’études fastidieuses, d’examens à n’en plus finir ; et tout cela avait eu pour résultat qu’un beau matin, le Ministère de l’Instruction publique m’envoyait, en qualité de lecteur de langue française, à l’Université de Budapest. Le baroque de la vie m’apparut alors dans son plein, lorsqu’accablé sous le poids de deux valises, cherchant péniblement un fiacre, quelque chose en moi songeait que tant d’heures de lycée, de Sorbonne et d’ennui, tant d’efforts ordonnés, poursuivis dans un même