Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 60.djvu/562

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
L’ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE AUX ÉTATS-UNIS
CARNETS DE ROUTE D’UN TÉMOIN


New-York, 5 octobre 1920.

Une élection présidentielle aux États-Unis est une bataille politique qui ne ressemble à rien de ce que nous connaissons dans notre vieille Europe. Nous ignorons cette fièvre qui ici a bientôt fait de gagner la foule des électeurs, et qui, encore augmentée par les polémiques d’une presse avide de nouvelles à sensation, se traduit, pendant trois mois, par des millions de tracts, des meetings innombrables et des processions colossales.

Les partis sont en Amérique organisés comme de grandes maisons de commerce. Leur budget énorme leur permet de faire une véritable débauche de publicité : enseignes lumineuses, drapeaux gigantesques, affiches en couleur. Aussi ne faut-il pas s’étonner de trouver sur les murs des gratte-ciel, entre un chameau colossal qui symbolise une marque bien connue de cigarettes et un ours qui mord dans un pneumatique pour en montrer la solidité, une tête énorme du sénateur Harding, avec cette légende : « Confiez les intérêts de la nation à un homme d’affaires éprouvé. Votez pour Harding ! »

Le quartier général du parti démocratique, installé au onzième étage du Central Palace, donne l’impression d’une entreprise industrielle menée par des habitués de Wall Street bien plutôt que d’un comité politique. Dans des bureaux spacieux, des femmes tapent sans arrêt sur des machines à écrire et des hommes ne cessent de téléphoner. Il y a là un directeur de la publicité, un « expert en chemins de fer » qui organise les tournées électorales, des agents chargés de surveiller la