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se recourbent et s’enchevêtrent en un prodigieux jaillissement de sève. Ailleurs, ce sont des chevaux de course, traités avec un réalisme si copieux et si vivant qu’ils ont l’air de sortir de leurs écuries : marqués à la croupe d’une lettre de l’alphabet, les jarrets serrés dans des bandelettes, une palme entre les deux oreilles, la couronne de laurier au cou, ils piaffent d’un air fringant, en agitant les rubans rouges de leurs queues et de leurs crinières nattées. A côté d’eux, les palefreniers en jaquettes multicolores font claquer leurs fouets. Puis ce sont les plantureux décors de salles à manger, — les fleurs et les fruits de l’Afrique, les guirlandes de roses et d’anémones, les épis entrelacés, les figues, les poires, les pommes, les coings, les cédrats, les grappes de raisin, — et tout le butin de la poche et de la chasse, les congres et les dorades, les perdrix, les canards, les faisans crêtes d’or, et les pintades numidiques au plumage ocellé…

Toutes ces figures éclatantes et fraîches éveillent le souvenir d’une vie facile et comblée, égayée par les formes les plus heureuses et les plus belles, en face de la mer lumineuse, sur les loggias à colonnades des hautes villas, ou dans les exèdres ventilés des jardins. La conque de Vénus marine a déposé sa nacre sur le ciel et sur tout l’horizon brillant d’Hadrumète.


LOUIS BERTRAND,