Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 59.djvu/545

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Beerst et qui reçoivent d’ailleurs des obus de partout sauf de l’Ouest. Une partie des troupes allemandes qui ont pénétré dans la ville gagne ses lisières nord, et y capture le P. C. et le poste de secours du bataillon Rabot, faisant prisonniers le médecin de 1re classe Guillet et son médecin auxiliaire Chastang. Le commandant Rabot est tué près de sa tranchée-abri, tandis que son adjudant-major Seryeix et la section de garde sont capturés, poussés brutalement vers l’Yser Nord et sommés d’inviter nos troupes de l’Yser Nord (rive gauche) à se rendre. Sans perdre son sang-froid, bien qu’il soit blessé, Seryeix entreprend de démontrer aux Allemands que nos troupes de la rive gauche sont très nombreuses, et que les sommations sont inutiles. Il gagne ainsi assez de temps pour qu’une contre-attaque conduite par le lieutenant de vaisseau d’Albiat survienne, bouscule le groupe, et refoule les Allemands, tandis que les prisonniers se hâtent de regagner les lignes en traversant l’Yser à la nage.

Le reste du bataillon Rabot n’en est pas moins cerné, sauf du côté de l’Yser, mais il fait tête dans les trois autres directions, jusqu’au soir, sous le commandement énergique des lieutenants de vaisseau Cantener et Bera. Quand la nuit est faite, ce détachement, qui compte encore 450 hommes, entreprend de gagner l’Yser en rampant dans les fossés remplis de vase et d’eau, en transportant ses blessés. Au bout de quatre heures d’efforts opiniâtres qui font le plus grand honneur à ceux qui les ont dirigés, le détachement parvient à l’Yser, aux environs du pont-route, et regagne nos lignes par une passerelle que la rive gauche met en travers, mais il est dans un état inimaginable de délabrement et d’épuisement.

Au cours de cette journée, nous avons perdu plus de 2 000 hommes tués, blessés ou prisonniers. Nous avons aussi perdu de nombreux officiers dont le capitaine de frégate Rabot, le chef de bataillon Brochot, et le médecin principal Lecœur, médecin-major du 2e de marins, qui a été tué par un obus dans son infirmerie d’Oude-Barreel.

L’analyse des causes qui ont déterminé la chute de Dixmude me conduit aux conclusions suivantes :

1° Les troupes de la tête de pont sont très fatiguées, bien près d’être épuisées. Depuis vingt jours, et du fait que je ne dispose d’aucun cantonnement d’arrière, les relèves des marins,