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difficile, mais il faut savoir s’y prendre. » Je dois ajouter que je lui avais fait part de la vive satisfaction que j’éprouvais à assister à une attaque faite par des troupes de métier, et dont je comptais tirer un grand profit pour mon instruction personnelle.

Nous perdons donc la compagnie de vue, à cause du brouillard, mais pour la voir apparaître de nouveau, au bout de quelque temps, et se repliant sur l’Yser, qu’elle franchit. Nous apprenons alors qu’elfe a gagné une autre tranchée vide, plus probablement un autre fossé, où elle a reçu, de la gauche, des feux d’écharpe qui lui ont tué ou blessé son capitaine et 15 hommes. Ces feux venaient, vraisemblablement, du 8e B. C. qui tentait de déboucher du Sud de Dixmude au même moment. A 10 heures, le brouillard disparaît, et la compagnie, qui s’est reformée sur la rive gauche, repart à l’attaque sous la conduite d’un sous-lieutenant, tandis que l’artillerie de campagne exerce une action massive sur le château et son parc. L’artillerie allemande ne répond pas, et il faut pour cela qu’elle ait quitté cette région pour le Sud. Sur la digue de l’Yser, il arrive seulement des balles en quantité modérée. Pour ne rien perdre des opérations, j’offre à déjeuner au général sur la digue, mais la situation reste stationnaire pendant tout l’après-midi. En fin de journée, les troupes venues de l’Ouest sont à 400 mètres des lisières du parc, celles du Nord n’ont pas progressé, et le général ne sait rien de l’attaque par le Sud. Les attaques n’offrant plus aucun intérêt pour moi, je descends alors à l’abri de la digue, dans la prairie où je m’asseois sur une chaise. Puis, comme la pluie tombe, un marin complaisant m’offre un vaste parapluie qu’il a déniché je ne sais où. Me trouvant ainsi tout à fait à l’aise, je m’endors profondément, vaincu par la fatigue, bien que notre artillerie tonne encore dans le voisinage. Au bout de peu de temps, je suis réveillé par l’arrivée du général près de moi, et je m’excuse de mon attirail peu militaire, mais je reprends vite l’avantage en offrant la protection de mon parapluie aux officiers d’état-major qui écrivent les ordres du général pour le lendemain.

Du côté d’Eessen, le 151e n’a pu faire aucun progrès. Le bataillon de Jonquières a envoyé sur la route de Beerst des reconnaissances qui n’ont pu dépasser nos avant-postes. En somme, aucun résultat pour la journée, bien qu’une dépense considérable de munitions d’artillerie ait été faite.